A l’occasion de la sortie de leur nouvel album, Scars Of The Crucifix, les suppôts de Satan de DEICIDE, maîtres incontestés du evil-death-metal, ont bien voulu nous accorder cet entretien, en la personne de Brian Hoffman, un des gratteux. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on n’a pas affaire ici à de la langue de bois, en ce qui concerne leur ancienne maison de disques ou encore l’implication de Glen Benton chez Vital Remains par exemple. Brian Hoffmann, ou le dernier des rejetons du Malin… de retour pour vous hanter !

 

Entretien avec Brian Hoffman - par Geoffrey et Will
 
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Noiseweb : Qu’est-il arrivé à DEICIDE depuis tout ce temps, depuis le dernier album ?
Brian Hoffman : Depuis Insineratehymn et In Torment In Hell, tout le monde nous pose cette question. C’est marrant. En fait, on était en quelque sorte en roue libre. Il faut retourner en 1995, quand les gens n’en avaient plus rien à foutre du death-metal et de DEICIDE, se tournant plus vers des groupes comme MACHINE HEAD, TYPE O NEGATIVE, MEGADETH, et en 1998, SLIPKNOT, etc.… Pendant ce temps, nous, on était encore sous contrat avec Roadrunner et on leur devait encore quelques albums. On a eu à réfléchir : quelle maison de disque pouvait bien encore avoir à foutre de nous ? On a fait « Once Upon The Cross », mais il n’y a eu aucune promo, aucune vidéo, alors qu’on nous l’avait promis. OBITUARY ou MORBID ANGEL ont fait des vidéos en 1995, pas nous. En 1997, on sort « Serpents Of The Light », et rebelote, que dalle. On a sué sang et eau sur cet album, bon album, et eux (Roadrunner) nous ont dit : merci les gars… Mais ils ne nous ont pas poussé là encore. On leur a donné 3 albums pour lesquels ils n’ont rien fait, tu comprends… Toi, tu te fais chier, et eux, ils ne se contentent de ne rien faire. A ce moment, on a fait un live, parce qu’on leur devait... En réalité, ils nous ont demandé un live, on leur a répondu qu’on ne leur ferait pas ce plaisir. Ils en ont sorti un quand même, puisque c’était dans le contrat. Ils avaient aussi déjà sorti le best-of, et ils ont dû en vendre 10 copies. On leur devait à ce moment-là encore 2 albums. Alors, on a fait « Insinerathymn », et ils ont continué à sucer le sang du groupe. On en a fini avec « In Torment In Hell », qui ne nous a rien apporté. Ils ne nous ont rien donné, nous, non plus. On a eu un budget de 4.000 $ pour le faire. Qu’est-ce que tu veux faire avec ça ?! Je dois avouer qu’on l’a fait à la va-vite, juste pour pouvoir se libérer d’eux et rester ensemble… Vous nous considérez comme de la merde, on vous donne de la merde (Ndlr : et les fans dans tout ça, bordel ?!). Je n’ai fait aucun solo sur cet album, incapable de faire quelque chose de bien ; Eric n’en a fait qu’un. Cet album a vendu 20.000 copies dans le monde, c’est faible pour nous. On a rempli notre contrat, pas eux. On s’est tirés de chez eux, appauvris, en leur donnant un gros Fuck You !

Noiseweb : Et vous êtes arrivés chez Earrache…
BH : Yeah ! Enfin, on s’est remis à composer pour leur donner un putain d’album ! Il y a enfin une vraie promo, on a eu les thunes pour le faire. Légalement, il n’y a pas de contrat : on leur donne l’album, ils en font ce qu’ils veulent. On leur a demandé ce qu’ils allaient en faire, le sortir avec des packagings intéressants, ce genre de trucs. Ils ont pris la pire photo de nous, on revient en leur disant : fuck you, c’est cool (rires) ! On revient sans se poser de questions, on met la gomme et on dévaste tout…

Noiseweb : Es-tu d’accord si je vous dis que c’est votre meilleur album ? On le pense vraiment…
BH : Tu le penses vraiment ? Cool… On a vraiment essayé de regagner de l’agression et le feeling que nous avions quand nous avons commencé en 1989/1990, de faire une musique brutale au top, on a pris le temps pour écrire les chansons. Si je veux comparer avec « In Torment In Hell », où nous composions une chanson par jour, tu vois… Pour « Scars Of The Crucifix », on a vraiment bossé toutes les chansons à fond, même si les structures sont venues très vite. J’ai écrit 6 chansons sur les 9 de l’album, les 4 premières qui apparaissent sur l’album ont été écrites en une nuit, mais j’ai proposé aux autres de les jouer, de les répéter, de prendre le temps de les apprendre, de les développer. Les opinions de chacun étaient importantes, comment ils les trouvaient, comment les améliorer… J’ai été à l’écoute. Certaines chansons ont nécessité des arrangements, certaines, non. Une chanson que j’ai écrite a été écartée, on n’a pas de problèmes d’ego dans DEICIDE. On a gardé ce qui était le mieux pour l’album. On peut rester droits avec cet album, ce qui n’a pas été toujours le cas. On a mis un an pour le réaliser, pas 9 chansons en 9 jours ! Plutôt 9 chansons en 9 mois (rires) ! Earrache ne nous a pas fait chier, ils ne voulaient pas d’une merde. Tout le monde devait être satisfait de l’album, être motivé pour le travailler. On a fait notre album le plus abouti, le meilleur peut-être. Nous voulions que cet album fasse date dans l’histoire de DEICIDE.

Noiseweb : Comment ça s’est passé en studio avec Neil Kernon, c’était la première fois que vous bossiez avec lui ?
BH : Je ne le connaissais pas. On a rencontré un gars pro, il a apporté du sang frais au groupe. Jim Morris, du Morrissound Studio, est aussi un grand pro. Il était juste temps de changer d’air. Je pense qu’on est partis pour plusieurs albums avec Neil aussi, tu sais, il connaît bien la musique brutale, il a fait quelques albums de CANNIBAL CORPSE… Il a demandé à écouter les chansons, on les lui a jouées live pendant une nuit, on a bu quelques bières et fumé quelques trucs (rires). On est ensuite restés en contact, et dès qu’il a pu, il nous a rappelés. Voilà… Le talent de Neil est de ne pas vouloir imposer de son aux groupes qu’il produit. Il écoute, et comme il est bon, il arrive à trouver les meilleurs plans. Il sait discuter, pas imposer. Il a su capter la manière dont nous sonnions déjà, mais en l’améliorant. « Scars Of The Crucifix » représente vraiment la manière dont nous devons sonner, quand on bosse ensemble. Neil est un super gars, un super producteur et c’est lui qu’il nous fallait pour ce boulot.

Noiseweb : Un nouveau contrat, un nouveau producteur, mais toujours le même groupe. Quelles sont les différences entre le DEICIDE du début et celui d’aujourd’hui ?
BH : Au début, il y avait de l’agression, de l’énergie, de la colère. On voulait tout ravager et laisser une impression dans le monde. Maintenant, avec ce qui nous est arrivés avec Roadrunner, on a une autre forme de rage. Mais on surfe maintenant sur la deuxième vague, si tu veux. Earrache a vraiment envie de pousser le groupe, ils arrivent à faire tout ce que Roadrunner a loupé. Donc, on voulait aussi en échange leur donner le meilleur album possible. Quand ils ont entendu les rough versions, ils ont dit : ok, on y va. Ils nous ont donné plus de fric que Roadrunner n’a jamais fait pour avoir un bon producteur, c’est vraiment le meilleur deal, pour eux comme pour nous, comme pour Neil Kernon… Tout le monde s’est impliqué pour que cet album soit ce qu’il devait être.

Noiseweb : Penses-tu que vous êtes arrivés trop tôt avec ce style de musique, de lyrics, que les gens n’étaient pas prêts pour ça ?
BH : Je pense qu’ils nous attendaient… Les gens étaient prêts à entendre ce genre de musique, il y avait une demande pour que nous retrouvions l’énergie que nous avions au début. Certains groupes ont essayé de le faire, ils n’y sont pas arrivés. Les gens comme vous savent que l’on a retrouvé cette énergie, cette brutalité, que les gens attendaient de cet album, puisque vous avez eu l’album avant tout le monde. Crois-moi, on n’a vraiment pas donné de bons albums à Roadrunner, parce que c’est ce que nous voulions, puisqu’ils se foutaient de nous, mais avec Earrache, une nouvelle ère s’ouvre pour DEICIDE. C’est ce que nous avons vraiment décidé.

Noiseweb : Il y a un DVD avec le nouvel album, peux-tu nous en parler ?
BH : Je pense que ça peut être fun pour les gens. Ca sort en édition limitée, même si je ne suis pas sûr du nombre exact de copies. Des mecs sont venus en Floride pendant la réalisation de l’album, ils ont filmé des répètes, l’enregistrement, notre prestation dans un festival metal, chez nous, montrant ce qu’est le vrai DEICIDE. C’est marrant que tout ça va se retrouver sur DVD, parce que c’est presque criminel (rires) ! Le film faisait presque 8 heures, et on ne retrouve qu’une demi-heure sur le DVD. Ce que vous verrez sur le DVD est la partie le plus soft de notre vie (rires) ! Si on avait pu le limiter qu’aux adultes, il y en aurait eu plus, mais comme ça risque de tomber entre les mains de jeunes ou d’enfants, légalement, on a calmé le jeu. Mais pour les fans, ça va déjà être cool, et vous allez passer du bon temps à le regarder. C’est un cadeau pour les 15 ans du groupe en quelque sorte.

Noiseweb : Vous avez déjà eu des problèmes avec la censure ?
BH : Non, pas vraiment. Parfois, on nous a dit que certains trucs étaient trop brutaux, que des gens pourraient en être choqués, des choses comme ça. Mais tant pis pour eux, on fait ce qu’on veut. Personne n’est obligé de regarder nos pochettes ou d’acheter nos albums. Nous avons nos paroles, nos photos, nos pochettes, on en est fiers et on continuera de faire comme ça. Mais on n’a pas vraiment eu de gros soucis avec la censure, non.

Noiseweb : Peut-être que vous avez aussi aidé d’autres groupes, de par vos choix, à ne pas être censurés aussi, non ?
BH : C’est comme un peu South Park, vous connaissez ? Et bien, je respecte ce que ces mecs ont fait avec ce cartoon, c’est stupide, parfois ridicule, mais même si je ne me marre pas de tout, ils ont jeté un pavé dans la mare de ce qui devait être vu ou pas dans le monde. Dans un sens, nos paroles et nos visuels ont forcé des gens à s’intéresser à ce que nous faisions, et ça a rejailli sur les autres groupes dans ce style. Les gens se sont peut-être habitués à être moins choqués par tout ça, en effet.

Noiseweb : Que penses-tu des side-projects, de ce que Glen Benton a fait avec VITAL REMAINS ?
BH : Pour dire la vérité, je pense qu’il a perdu son temps. Ils se sont servis de son nom, pour en faire un projet solo de Glen Benton. Il a fait ce qu’il a voulu, je ne me sens pas concerné par ça. J’ai mon propre boulot à faire, tu vois ? On connaît les gars de VITAL REMAINS depuis longtemps, on a tourné avec eux, ce n’est pas le problème. Ce qu’ils ont fait dans leur coin est bien avant ça, mais Glen ne m’a pas demandé mon avis, je n’étais même pas au courant. Il y est juste allé et il l’a fait. C’est son choix, mais DEICIDE a à faire son truc, j’ai à faire mon boulot, je n’ai pas de temps à perdre dans des side-projects, on me l’a déjà demandé de toute façon. Je n’ai pas refusé parce que je n’aimais pas ce qu’on me proposait, mais tout simplement parce que j’ai déjà un groupe. C’est ce que j’ai choisi de faire, je ne vois pas pourquoi j’irai perdre mon temps chez les autres, juste pour soigner mon ego.

Noiseweb : Mais tu es quand même satisfait de ce que Glen a fait sur ce nouvel album ?
BH : Hum… Vocalement, c’est parfait, il a fait du bon boulot, mais au niveau de l’écriture des paroles, il aurait pu mieux faire. Il écrit ce qu’il écrit, mais il peut mieux faire. C’est juste mon opinion.

Noiseweb : Quand verra-t-on DEICIDE en concert, en France et en Europe ?
BH : Nous avons fait quelques concerts avec le Metallysée (organisation de concerts belge) pour le Christmas Festival en décembre, et quand l’album sera sorti, nous serons de retour chez vous avant cet été, bien que je ne connaisse pas les dates par cœur. Mais crois-moi, on a hâte de défendre ce nouvel album live, on veut que les fans présents ressortent contents et qu’ils soient contents de l’album. La version promo que vous avez eue n’est pas la version finale, ce n’est pas mixé, le son sera bien meilleur, beaucoup plus puissant, avec des packagings intéressants et toutes les paroles aussi ! Les gens vont être dévastés par cet album (rires) !

Noiseweb : Pour finir, on veut vraiment te remercier pour ton temps, pour ce que vous avez fait pour le death-metal et le métal en général.
BH : Merci. Crois-moi, c’est un plaisir, nous voulons partir en ayant laissé notre marque dans le monde en ayant créé la musique la plus heavy. On se voit en tournée. Bye !