La TEXTURES... Un nom de groupe qui ne dit peut-être pas grand chose. On espère donc que cette interview corrigera cette erreur, tant la musique death ultra sophistiquée de ce groupe venu des Pays-Bas, est intéressante et mérite que l'on s'y attarde. Signés chez Listenable Records, le groupe, dès son premier album, relègue déjà la concurrence à des années-lumière.

 

Entretien par Fabien & Will
 
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Peux-tu présenter l’histoire du groupe aux lecteurs de Noiseweb ?
Bart (guitares) : TEXTURES a démarré en 2001, et une fois que nous avons réussi à trouver notre son en répètes, nous avons décidé d’enregistrer un album aussitôt que possible. Nous n’avions fait qu’un seul concert avant d’enregistrer « Polars ». En décembre 2001, nous avons construit notre propre studio dans notre salle de répétitions et nous avons passé le plus clair de notre temps à tout organiser autant que nous le pouvions pour obtenir un son décent pour enregistrer. Après 2 semaines d’enregistrement, nous sommes allés dans le home studio de Jochem pour enregistrer le reste et bien sûr, nous avons aussi beaucoup répété en vue de prochains concerts.
TEXTURES se compose des membres suivants :
Eric Kalsbeek : voix
Dennis Aarts : basse
Jochem Jacobs : guitares et voix
Stef Broks : batterie
Richard Rietdijk : synthés
Bart Hennephof : guitares

Récemment, vous avez décidé de cesser de collaborer avec votre chanteur, Pieter Verpaalen, pourquoi ?
La diversité qui caractérise la musique de TEXTURES nécessite une variété de styles vocaux et le travail de Pieter n’allait pas dans cette direction, ce qui n’est pas le cas de Eric maintenant. Ce fut une décision difficile à prendre, vraiment.


Excepté au niveau de la composition du line-up, pensez-vous que ça change beaucoup de chose que Pieter ne soit maintenant plus dans le groupe ? Les parties vocales sont si importantes que ça dans la musique de TEXTURES ?
Eric a un style vraiment unique dans les deux styles de voix, pensé en fonction de la musique. Il a vraiment proposé des mélodies bien cool et des bonnes intonations avec sa gorge quand nous écrivions du nouveau matériel. Les parties vocales sont aussi importantes que le reste, tu peux voir la voix comme un instrument additionnel. La musique et les voix sont vraiment proches pour au final fusionner dans les compos elles-mêmes. Nous n’allons pas changer notre style, nous avons juste avec Eric plus de liberté vocale.

Maintenant qu’Eric Kalsbeek est dans le groupe, que va-t-il apporter de plus aux morceaux et à la musique de TEXTURES ?
Sa voix est assez différente de celle de Pieter et il va réussir à magnifier les morceaux de Polars certainement de manière parfaite !

Eric a fait ses débuts avec le groupe le 6 mars à Metropool. Comment cela s’est-il passé pour lui et comment fut le show en général ?
Il a été super ! On s’est vraiment bien marrés, c’est sûr ! Nous avons d’ailleurs joué une nouvelle chanson durant ce concert avec des parties vocales qui n’étaient même pas finalisées et Eric a magnifiquement improvisé sur ces parties-là ; il nous a complètement bluffés ! Après ça, le show est devenu meilleur, encore plus sauvage. On s’est lâchés après… Une sacrée expérience.

Maintenant, parlons de votre album, Polars… Premièrement, on doit vous dire que votre nom de groupe est un véritable miroir de la complexité et des nuances de votre musique, êtes-vous d’accord ? Y a-t-il pour vous un sens particulier dans ce nom ?
Vous avez très bien décrit la chose… Le nom TEXTURES rassemble la variété de personnalités au sein du groupe, nous avons tous un passé différent, que ce soit au niveau de la musique ou au niveau de nos vies. Et il synthétise aussi nos schémas de pensée dans un sens philosophique. Nous avons tous un but en commun et nous avons donné à cet objectif un nom : TEXTURES.

Deuxièmement, nous voulons par le biais de cette interview vraiment vous féliciter pour votre excellent travail et le résultat qui en est sorti ! Un de nos albums préférés du moment ici à Noiseweb !
Merci, nous apprécions vraiment. Nous ne nous attendions pas à toutes ces réactions positives ! Ça nous donne une putain d’énergie…


Maintenant, venons-en finalement à Polars. La structure de l’album est plutôt inhabituelle : nous avons 6 chansons « normales » d’environ 4 - 5 minutes de longueur, une sorte de chanson conceptuelle de 18 minutes et un instrumental de 14 minutes. Comment expliquez-vous ça ? Polars est un album concept ?
La chanson « Polars » de plus de 18 minutes rassemble toutes les extrémités de ce disque à elle seule, les parties les plus violents, les plus calmes, tout y est. Nous voulions finir le CD avec des choses vraiment intenses, d’où la présence de 2 chansons équivalant à un temps de 34 minutes. Nous avons beaucoup bossé sur ces chansons. Les paroles de « Polars » et les idées qui s’y rattachent sont pour nous très intenses. On y traite de la base philosophique qui est en chacun de nous, pour trouver une sorte de paix rien qu’en écoutant de la musique. La chanson vous permet de voyager dans différentes sphères, et « Heave », qui est la suite de « Polars », termine l’album en vous transportant dans un environnement musical de paix, pour vous aspirer finalement vers un silence complet.

Dans le futur, pensez-vous que vous écrirez plus de chansons dans le style de « Polars » ?
Nous sommes déjà très occupés à écrire du nouveau matériel en ce moment, c’est très excitant ! Nous prévoyons d’écrire une heure de musique pour le prochain CD, ce qui pourrait d’ailleurs consister en une seule chanson. Il devrait y avoir plusieurs chansons, mais combinées en une seule unité.

La chanson « Polars » résume à elle seule la musique de TEXTURES à notre sens. C’est une chanson très complexe, comme les autres musicalement parlant. Quel est le passé musical des membres de TEXTURES ?
Nous avons tous fait partie de groupes différents avant. Tous ces groupes avaient des influences métal, mais nous écoutons tous des choses bien différentes. Tout le monde joue chez lui, s’entraînant à mieux jouer de son instrument. Ceci dit, nos vies très occupées au travail et à l’Education sont souvent une barrière au développement de nos envies musicales. Mais nous continuons de jouer malgré tout !

Avez-vous parfois le désir de jouer une musique plus accessible ?
Certaines personnes disent que nous nous éparpillons un peu trop, mais la plupart du temps, on nous dit : « au début, je ne pouvais pas appréhender votre musique, mais après plusieurs écoutes, ça allait mieux ». Je connais des gens qui ne la comprennent pas du tout, mais ceci dit, en concert, le plus important pour le public est de bien ressentir le groove et ça marche en général !


Comment définissez–vous votre musique, parce que sur votre site, nous avons vu que vous disiez que vous jouiez du métal progressif. Quelle est votre définition du progressif ?
La musique progressive est pour nous expérimentale, insistant sur des détails, singulière et technique. Nous aimons juste jouer des rythmes torturés, jouer vite et de manière énergique. C’est un challenge à chaque fois. Mais si nous trouvons un passage simple, nous l’utilisons. Il faut juste que ça le fasse !

Il y a deux chansons assez différentes sur Polars, c’est « Effluent » et « Heave ». Pourquoi avez-vous inclus des chansons atmosphériques ?
Ces deux chansons sont là en quelque sorte pour laisser le CD respirer et dans un sens pour créer de bonnes atmosphères. Nous avons expérimenté pour obtenir des sons planants entre les chansons. Avec certaines chansons, ça ne fonctionnait pas ; avec d’autres, ça s’imposait. Sur « Effluent », c’est un son confortable, il te suffit juste de laisser entrer les son dans tes oreilles et te laisser transporter dans un moment lent de paix, juste avant que « Polars » ne commence...

On ne veut pas forcément faire de comparaisons, mais on reconnaît ça et là des influences de Meshuggah (entre autres) dans les rythmiques quand on écoute Polars. Est-ce une de vos influences ? Et quelles sont vos autres influences, qui vous permettent de créer une musique si intense et si riche ? Le jazz ? Seulement des groupes métal ?
Nous aimons tous les groupes et les compositeurs qui essaient d’expérimenter avec les rythmes et les mélodies, nous n’écoutons bien sûr pas que du métal. Nos influences viennent de partout. A la maison, chacun de nous absorbe des influences musicales provenant des petits films musicaux, du classique, de la fusion, du jazz, de l’électronique, de la pop, du rock au métal, du death metal. Et évidemment, nous échangeons nos musiques entre nous pour ouvrir les esprits de chacun aux influences des autres, pour progresser encore et encore…

Les synthés sont des instruments très importants dans la musique de TEXTURES et apporte des consonances atmosphériques durant les breaks. Comment composez-vous une chanson comme « Polars » ?
Nous commençons juste à écrire et quelquefois, un d’entre nous propose d’inclure un blast-beat de fou, parfois, nous avons juste à faire un break pour inclure un passage sphérique. Le plus important est que le tout sonne naturel.

Y a-t-il des invités sur Polars ? Sur une chanson, il y a du saxo…
Oui, le solo soprano-saxophone dans "Transgression" est joué par Wouter Wierda, il a même joué live avec nous le 3 avril à Amstelveen. C’est un merveilleux musicien, j’espère jouer encore avec lui !

Peux-tu nous en dire plus à propos de l’enregistrement ? Vous avez bâti votre studio, vous avez tout fait vous-même. C’est un processus assez inhabituel pour un jeune groupe, non ?
Nous ne pouvions pas avoir plus d’argent. Donc, nous avons dû faire avec les moyens dont nous disposions. Je pense que nous sommes capables de faire ça seuls, surtout avec Jochem et Richard à la production. Ils ont étudié pour ça et c’est ce qui les fait vivre.

Quelles sont les réactions de la presse face à votre travail ?
Les réactions que nous avons recensées provenant des magazines, des webzines ou des journaux sont vraiment enthousiasmantes. Nous avons été quelque peu surpris par cette réponse, nous faisons juste notre truc en continuant d’essayer que ça plaise. Nous aimons ça et il semble que le public aussi !

Au niveau des textes, Polars est un concept album ?
Oui, le concept de Polars est : contraste - vie - nature et tous les aspects connectés à ces mots. Le contraste est juste un mot fort, il reflète la vie elle-même. Mais il exprime aussi les contrastes entre la nature et l’industrie, la vie et la mort, le sombre et la lumière, la liberté et l’emprisonnement, etc…

De quoi parlent les paroles ?
Il y a une profonde et honnête narration à propos de la vie et de ses périls, une dure leçon sur l’organisation du chaos. Ca parle aussi de briser les barrières, d’être honnête et de dire la vérité, à propos des traditions et de la mémoire, trouver une structure en chaque chose, la même chose que ce que la musique doit t’inspirer, et ce, sans les paroles.

Un mot à propos de l’artwork, vraiment cool pour nous. C’est en rapport avec la musique et les paroles ? Qui l’a réalisé ?
Merci pour le compliment, c’est moi qui m’en suis chargé. Oui, ça complète le côté mental, audio et expérimental, pour former un tout. C’est un visuel qui rassemble les interactions entre la nature et l’industrie. Deux choses bien distinctes, avec chacune sa fonction propre, qui se connecte à l’autre naturellement. La nature est une grande source d’inspiration pour nous tous. La sérénité des grands espaces mixée avec les machines représentait pour nous une bonne source pour le visuel.

La première version de Polars est sortie sous forme de digipack. Considérez-vous le packaging comme une chose essentielle ?
Nous voulions faire quelque chose de spécial pour les premiers CD mis en circulation donc nous avons créé ce digipack. La version que Listenable a mis en vente était une édition limitée en slipcase avec une plage vidéo. Slipcase ou digipack, c’est essentiel que le packaging complète le tout. Ainsi, tu peux avoir un aperçu de ce que va être la musique. Un packaging différent est aussi primordial pour donner une touche spéciale, nous avons donc donné la touche « Textures » (rires).

Comment voyez-vous la scène néerlandaise de nos jours ?
C’est très vivant et elle refait surface en ce moment. C’est toute la scène qui redevient intéressante. Les gens qui apprécient de la musique qui leur ouvre les oreilles sont de plus en plus nombreux et pas seulement dans la frange la plus jeune du public. Même mes parents aiment ce qu’on fait, ce n’est pas beau, ça ??!!!

Comment avez-vous obtenu ce contrat avec Listenable et sur quoi porte-t-il ?
Quand nous avons eu fini d’enregistrer, nous avons envoyé une tonne de promos en Europe et aux USA… et Listenable a été un des premiers à réagir. Et la manière dont ils ont réagi a été déterminante quant à notre choix ; ils ont été super enthousiastes ! Listenable est connu pour sa bonne promotion et sa distribution, ils sont le bon vecteur pour faire connaître notre musique.

J’ai vu que vous alliez être à l’affiche du Fury Fest (avec entre autres Meshuggah !) en juin. Peut-on espérer vous voir ailleurs en France ?
Je l’espère ! Rien n’est prévu pour le moment, mais notre agence de concerts, Loudnoise Productions, est en train de nous préparer quelque chose dont je ne peux pas encore parler, bien sûr dans un but stratégique. Ils essaient vraiment de nous trouver quelque chose d’assez gros chez nous pour la fin de l’année. Ce n’est que le début, ce n’est pas maintenant qu’on va se reposer (rires) !

Est-ce difficile de jouer la musique de TEXTURES en live, de retranscrire toutes les ambiances ?
Nous avons pas mal joué maintenant, et nous avons le souci de toujours analyser nos shows pour améliorer les choses qui n’ont pas bien fonctionné, pour se rapprocher le plus du son du CD.

D’autres projets en vue ?
Oui, je joue dans un groupe de death metal appelé BRUTUS, qui officie dans le plus extrême du style ! Le seul but est de jouer vite, puissamment et heavy. Mais les concerts avec TEXTURES repoussent à plus tard ceux de BRUTUS pour le moment. Eric chante aussi dans un groupe de hardcore appelé SENGAIA et Jochem compose des musiques pour des films.

Quels sont les albums qui vous ont bien botté le cul ces temps-ci ?
Je n’écoute pas de musique très récente ces temps-ci, mais j’ai vraiment aimé le nouveau APHEX TWIN. Les derniers albums de death metal qui m’ont retourné sont « Conquering the Throne » de HATE ETERNAL et « Slachtbeest » de BRUTUS. Dans un autre style, STING, NICK DRAKE et LEVEL 42 m’ont bien botté le cul aussi pour leur côté ultra-professionnel (les vieux trucs) et « Beneath The Remains » de SEPULTURA continue de toujours me plaire (rires)…

Un dernier mot pour les lecteurs de Noiseweb ?
J’espère pouvoir rencontrer des français au Fury Fest, au Mans, le 26 juin ! Pour le reste, restez branchés sur nous ! Merci beaucoup (Ndlr : en français dans le texte) !