Bon, autant être honnête d'entrée, j'ai toujours été un fan invétéré de la musique d'YYRKOON, et "Dying Sun" avait été un de mes albums de chevet en 2002. C'est donc avec une joie non feinte que j'avais découvert la nouvelle production du groupe, sortie chez Osmose Productions, "Occult Medicine". D'aucuns diront que ce 10/10 attribué à l'album dans ma chronique est peut-être dû à un manque de discernement de ma part, mon côté fan du groupe m'aveuglant. Mais en fait, si vous avez écouté l'album, vous vous serez rendus compte à quel point YYRKOON a repoussé ses propres limites, orientant sa musique vers encore plus de brutalité et avec une maestria encore rarement atteinte par un groupe français. Nous avons donc voulu en savoir plus, et comme pour les riffs de sa musique, les réponses de Jeff ont été denses et intéressantes. Faites plus ample connaissance avec peut-être un des nouveaux leaders de la scène extrême européenne ! C'est tout le mal qu'on leur souhaite...

Entretien avec Jeff - Par Will Of Death
 
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Vous pouvez présenter brièvement l'historique du groupe à nos lecteurs, svp, ainsi que les membres ?
Salut Will et bonjour à tous les lecteurs de Noiseweb. Ici Jeff, c’est moi qui vais tacher de répondre à cette interview ! Ouah, dix ans d’existence ça va être dur à résumer ! Mais je vais essayer…
Le groupe a été crée en 1995 par quatre membres, Stéphane Souteyrand (guitares), Paul Bannas (guitare et chant), Sébastien Caron (basse), et Laurent Harrouart (batterie) qui commencèrent tout de suite à composer leur propre musique . Un an après, une première démo « Oath, Obscure, Occult », aux influences très variées voit le jour, intégrant aussi bien des influences heavy metal que des influences plus extrêmes.
Cette première démo permet au groupe de décrocher un deal avec Velvet Music International pour un premier album. Le groupe commence alors la composition de cet album et décide d’intégrer un claviériste. Stéphane, que je connais depuis toujours, me propose de rejoindre le groupe et connaissant son potentiel, j’accepte immédiatement.
Mais à l’aube de l’enregistrement au Walnut Groove Studio apparaissent des différences d’investissement et de motivation entre les membres du groupe. Un conflit éclate, Paul décide de quitter le groupe et Sébastien le suit.
Jérôme Barroin (guitares) et Kristopher Laurent (basse) intègrent le groupe rapidement et Stéphane décide d’assurer le poste de chanteur !
« Oniric Transition » voit le jour en 1998. Le résultat est mature, technique, mais aussi plus varié ,notamment avec l’apparition de chant clair, de violon, de solo de guitare à consonances heavy metal, le tout accompagné de riffs très personnels !
Nous multiplions les contacts et nous nous rendons compte qu’il nous faut un label plus professionnel pour évoluer .Nous décidons donc d’enregistrer un mini CD afin de démarcher...
En 2000, naît « Forgotten Past ». Jérôme décide de quitter le groupe pour se consacrer à ses projets musicaux personnels et le groupe se retrouve sans guitariste pendant plusieurs mois.
Nous trouvons après maintes auditions François Falempin. Il intègre le groupe mais les problèmes de line up continuent et nous devons nous séparer de Kristopher qui s’oriente dans une direction musicale différente de la nôtre. Par chance, nous trouvons, peu de temps après, Victorien Vilchez et le courant passe instantanément avec lui.
Après un concert à Paris en 2001, nous rencontrons Stéphane Brulez qui monte son label (Anvil Prod). Il nous propose un deal pour 2 albums que nous acceptons, devenant ainsi le tout 1er groupe de son label.
En avril 2002, « Dying Sun » est enregistré au Emma studio.
Les compositions de l’album apparaissent toujours aussi riches et variées mais également plus fidèles à nos influences premières (heavy et thrash old school.). Bien que l’on puisse retrouver toutes sortes d’influences dans notre musique, celle- ci s’affirme alors être de plus en plus personnelle. Les claviers se font moins présents et les compos axées de plus en plus vers l’efficacité.
En 2003, nous commençons à composer le 3ème album et les problèmes de line up continuent.
D’une part, François se démotive peu à peu et le groupe est de moins en moins satisfait de son travail. Le clavier devenant de moins en moins nécessaire, nous décidons de le supprimer et j’intègre alors la place de François. Stéphane et moi ayant grandi et appris la guitare ensemble, nous sommes depuis toujours sur la même longueur d’onde, tout apparaît alors évident. Nous composons les morceaux d’Occult Medicine et réservons le studio Hansen pour les enregistrer.
Mais les problèmes continuent encore et toujours. Laurent, notre batteur depuis toujours, essuie de graves problèmes personnels et nous décidons ensemble de faire appel à Dirk Verbeuren pour enregistrer l’album.
Pendant notre séjour au Danemark, décidant de quitter Anvil Prod , nous envoyons des extraits de l’album à différents labels. Osmose Productions s’avère intéressée…

Quelles sont ou ont été vos principales influences au départ ?
Nos influences sont vraiment très diverses, mais au départ, nous sommes influencés par les groupes de heavy et de thrash des années 80, comme Black Sabbath, Saxon, Judas Priest, Overkill, Annihilator, Slayer ….et par la suite par des groupes comme Morbid Angel, Emperor pour ne citer qu’eux.

Il semble que ce ne soit pas très facile de rester dans YYRKOON ! Le système n'a pas l'air d'être très démocratique vu de l'extérieur du groupe...
J’imagine que de l’extérieur, vus les nombreux changements de line up, ça n’a pas l’air démocratique mais ce n’est pas pour cette raison que c’est dur de rester dans Yyrkoon, car l’avis de chaque membre est pris en compte et tout le monde doit être d’accord.. La raison pour laquelle il est dur de rester dans le groupe, c’est qu’il faut que chaque membre se sente à sa place à 100% ! Si le groupe forme une unité comme actuellement, Steph, Victo et moi, la question de la démocratie ne se pose pas au sein d’une entité unique !

Pourquoi votre batteur vous a-t-il quitté juste après l'enregistrement ?
Comme je le précise précédemment, Laurent a vécu des problèmes personnels qui l’ont complètement démotivé et nous ne pouvions plus compter sur lui. J’espère qu’il reprendra du poil de la bête.

Votre album sort chez Osmose Productions. Pourquoi avoir choisi ce label et quelles conclusions tirez-vous de l'expérience Anvil Rec ?
Osmose Productions est un label très pro, il se bouge réellement pour ses groupes et a fait plus d’une fois ses preuves .Quant à Anvil, nous avons été déçus sur plus d’un point. Nous n’avons toujours pas à l’heure actuelle signé de contrat avec eux, et apparemment, nous ne sommes pas les seuls dans ce cas. Un exemple qui vous donne une petite idée de la façon dont ils respectent leurs engagements !

Parlons du nouvel album. Premièrement, le son est assez fantastique. D'une part, comment se sont passées les sessions avec Jacob Hansen et pourquoi l'avoir choisi comme producteur ? D'autre part, le résultat est-il conforme à vos attentes ?
Les sessions avec Jacob étaient vraiment superbes, il est très rapide et très efficace, nous l’avons choisi pour la qualité de ses productions et le résultat est plus que satisfaisant.

Enregistrer chez lui ne doit pas être très économique, vu son statut actuel de producteur en vogue. Comment l'enregistrement de cet album a-t-il été financé ?
De quoi ? Jacob est dans le magazine Vogue ?!!! Non, sans déconner, ah ! C’est pour ça qu’on a payé cher alors ! (Rire). Non sérieusement, nous sommes restés presque un mois et au vu de la qualité qu’il nous a offerte, c’était vraiment très honnête. D’autant plus que l’hébergement est compris dans le prix .Quant au financement, la moitié devait être pris en charge par Anvil et l’autre par nous .Au final, Osmose a tout financé !

Il semble, au regard des titres, que cet album soit assez conceptuel au niveau des textes. Suis-je dans le vrai ou pas ? Quels sont les thèmes abordés ?
Tout à fait, les textes racontent l’histoire d’un docteur dément qui renie le serment d’Hippocrate afin de poursuivre ses expériences malsaines. Les textes sont racontés de deux façons différentes, d’une part vu de l’extérieur et d’autre part directement du point de vue du dément !

Votre style est beaucoup plus direct sur cet album. Pourquoi vous êtes-vous engagés dans une voie plus brutal-death ?
En effet, le style est beaucoup plus direct, et nous nous sommes engagés vers quelque chose de plus brutal, tout en gardant les éléments et la personnalité que nous nous sommes forgés au fur et à mesure de l’évolution du groupe .Nous savons actuellement exactement ce que nous voulons et surtout, nous savons comment faire pour arriver à nos fins. Occult Medicine est beaucoup plus homogène que ses prédécesseurs, comme toujours, les morceaux ont chacun leur personnalité, tout en se rejoignant au sein d’un même esprit. Yyrkoon est et restera un groupe à part avec sa propre touche, c’est ce qui le rend si difficile à étiqueter !

Autre singularité de cet album : il n'y a plus de claviers ? Pourquoi ?
Tout simplement parce que nous voulions quelque chose de plus brut, des lignes de claviers auraient été plus qu’inappropriées sur la musique d’Yyrkoon actuelle ; c’est un choix artistique vers l’énergie. Une ligne de clavier type instantanément une partie, au même titre qu’une guitare saturée ou qu’un blast à la batterie. On a remplacé le clavier par les blasts, c’est un choix !

Autre chose, il n'y a pratiquement plus de voix claires sur Occult Medicine. Là encore, un choix vers plus de radicalité ?
Stéphane avait enregistré quelques voix claires, qui sonnaient très bien d’ailleurs, mais qui dénaturaient l’esprit global de l’album. Nous avons donc décidé d’enlever la plupart de ces voix !

Votre musique est aussi très variée au niveau des tempos. Le meilleur moyen pour ne jamais ennuyer l'auditeur selon vous ?
En effet, les tempos varient d’un morceau à l’autre, ce qui enrichit et permet de faire respirer le tout, mais ils varient beaucoup moins à l’intérieur même des morceaux afin que cet enrichissement ne soit pas au détriment de l’efficacité. Je ne sais pas si c’est le meilleur moyen de ne jamais ennuyer l’auditeur, mais ça ne peut qu’enrichir l’écoute.

Quels sont les titres qui vous ont donné le plus de fil à retordre sur cet album ?
Je pense que c’est « Occult Medicine » qui nous a donné le plus de fil à retordre, elle n’est pas évidente à faire sonner. Pour ma part, je me souviens avoir butté sur un riff de « Revenant Horde » qui pourtant n’est pas plus technique que ça. Sinon, un passage au milieu de « Surgical Distortion » nous a fait aussi perdre un peu de temps .Mais dans l’ensemble, il n’y a pas eu de problèmes.

Pensez-vous que cet album est vraiment celui de la maturité et que vous allez continuer dans ce style dans le futur ?
Je pense que plus nous évoluerons, plus nous forgerons notre propre style. Cet album est celui de la maturité, puisqu’un an après l’avoir enregistré, nous sommes toujours aussi satisfaits. Nous ne changerions pas la moindre note si c’était à refaire !

Les solos de cet album sont vraiment très cool. Mais ce qui marque le plus, c'est que YYRKOON soit devenu une vraie machine à riffer !!! Tu es d'accord pour dire que le côté rythmique est mis très en avant sur cet album (je pense par exemple au titre "Censored Project") ?
Les soli sont vraiment sensationnels, c’est le mot qui convient à mon sens. Sans parler de technique, Stéphane a une faculté à faire passer l’émotion dans ses chorus, qui est tout bonnement prodigieuse. Quant au côté rythmique de l’album, Steph et moi avons toujours su riffer, sans prétention aucune, c’est quelque chose d’inné, et de plus, une condition sine qua non pour faire du métal (faut que ça bourre !!!). Certes, le côté rythmique est mis en avant, mais à dire vrai, nous ne nous sommes pas posés la question, cela allait de soi !

Quelles sont vos attentes pour cet album ?
La plus grande reconnaissance possible et le maximum de concerts dans les meilleures conditions, avec les meilleurs groupes.

Quel est le futur du groupe au niveau des concerts ?
Nous jouons le 11 décembre, à l’espace Curial (Paris, 19éme), avec Scarve et Textures. Et une première partie sur la tournée d’Impaled Nazarene est en train de se mettre en place !!!


Y a-t-il un groupe avec qui vous aimeriez particulièrement partager l'affiche ?
Difficile comme question ! Un groupe en particulier !? Il y a pas mal de groupes avec qui nous aimerions partager l’affiche !

Quels sont les derniers concerts que vous êtes allés voir ?
Le dernier concert que je suis allé voir était une interprétation du Concerto de Aranjuez de Rodrigo, que je n’ai pas trouvée transcendante (mais tout est relatif…). Et sinon nous avons vu Loudblast, avec qui nous avons partagé l’affiche, c’était vraiment excellent !

Y a-t-il un groupe qui vous ait particulièrement botté le derche ces temps-ci ?
Behemoth sont les derniers en date à m’avoir botté le cul, et il parait que le dernier Saxon est excellent, mais je ne l’ai pas encore écouté.

Une question qui va peut-être vous énerver, je n'en sais rien, mais que pensez-vous du fait que Burgul Torkhain ait cessé ses activités ?
En toute franchise, ça m’est égal. Nous nous sommes séparés de Kris car nous ne partagions pas la même vision de la musique, mais je ne lui souhaite que du bien et j’espère qu’il réussira dans ses projets à venir !

Que peut-on vous souhaiter de mieux vis-à-vis de YYRKOON ?
Réussir à se faire une place dans la cour des grands !

Comment voyez-vous le métal de nos jours en France ?
De mieux en mieux, de plus en plus de groupes français se donnent les moyens et me bottent le cul, que ce soit Gojira, Fatal ou DSK pour ne citer qu’eux !

Un dernier mot pour les fans, pour leur donner l'envie d'aller vers Occult Medicine ?
Occult Medicine est une réussite totale, avec un relief musical jamais réalisé auparavant, il y a toujours un élément mixé en avant qui permet à l’auditeur de ne jamais s’ennuyer une seconde !

Et pour les lecteurs de Noiseweb ?
Merci à tous les lecteurs, enjoy the best and fuck the rest !!

Encore merci à vous pour votre album et pour cette interview ! Venez faire un tour du côté de Lille ou de la Belgique le plus vite possible !