Prong


Prong est un groupe culte. Mais depuis des années, on a eu un peu tendance à oublier tout l'impact que le groupe a pu avoir. Dernièrement, un album live et un album en demi-teinte n'ont sûrement pas aidé. Et puis, quand il y a quelques années, le guitariste Tommy Victor s'est retrouvé en train de riffer chez Ministry, on n'y croyait même plus du tout. On pensait le groupe bien moribond. Mais c'était enterrer un peu trop vite son leader, qui, coûte que coûte, continuera Prong, son bébé...

Entretien avec Tommy Victor (guitares / chant) - Par Geoffrey
Rechercher : dans l'interview

Avec le recul, comment juges-tu Scorpio Rising ?
Je ne l’aime pas, cet album m’a beaucoup déçu. Les circonstances autour de ce disque sont assez bizarres. J’avais des démos pour un autre projet que j’ai utilisées pour ce disque alors que ça ne collait pas, on s’est un peu précipité aussi dans l’écriture du reste, et notre guitariste n’a eu que peu de temps pour ses parties. C’était un vrai cauchemar. En plus, le label sur lequel il est sorti ne nous a pas vraiment aidés au niveau de la promo.

Tout cela a peut-être aidé ce nouveau disque, plus énervé que jamais…
Tout a été différent. Certain morceaux proviennent de vielles démos, d’autres sonnent comme des appels à l’aide. L’album est très influencé par la situation actuelle du monde avec beaucoup de thèmes autour de la politique, les répressions de toute sorte, l’exclusion. Mais bon, tout ceci est la base même du rock n’ roll. Certains nous décrivent comme un groupe d’indus metal, à cause des samples. Mais on a toujours voulu rajouter un peu plus à tout ça.  Pour moi, nous jouons juste du rock dans sa forme la plus basique.
 
prong

Comment s’est passé le travail sur ce nouvel album avec le groupe ?
Relativement facile. Notre batteur, a déjà joué sur plusieurs tournées de Prong, et connaît donc bien le groupe. A chaque fois, il apportait une autre lumière sur les anciennes versions démo travaillées avec un autre batteur, avec tellement d’énergie et d’inspiration. Il a tellement bien compris les morceaux que j’avais prétravaillés sur ordinateur, que nous n’avons pas eu besoin de tous ces effets que j’avais utilisés sur Rude Awakening.  Pour Mani, cela fait tellement de temps que nous travaillons ensemble. Il est incroyable. J’ai la chance de travailler avec des gens faciles à vivre en répète, et nous passons du bon temps ensemble.

En t’entendant, tu as l’air si enthousiaste sur ce nouveau disque… Tu penses que vous avez peut-être un peu perdu de temps ces dernières années ?
Je ne peux pas me projeter. Le disque est comme il est, j’ai juste fait de mon mieux. Bien sûr, rien n’est parfait… Le disque est fini, je peux me dire : « je l’ai fait »… Je ne veux pas avoir l’air de célébrer quelque chose, je ne l’ai jamais fait. Il y a toujours de nouveaux challenges dans la vie, et faire un disque sous le nom de Prong en est un. Je ne sais pas ce que demain peut apporter, donc je profite, tout en faisant attention.

On a déjà parlé un peu des thèmes, j’aimerais approfondir un peu…
« Looking For Them » parle de la situation aux Etats-Unis où les artistes, les peintres, les musiciens, sont souvent considérés comme des loosers. J’essaye toujours de généraliser. Mais la société semble de plus en plus exclure ceux qu’elle classe comme indésirables. Je me base sur ce que je vois dans les médias. On ne s’est jamais souciés d’être populaires alors quand je vois tous ces groupes qui se lancent dans cette surenchère pour être le plus populaire possible, je n’aime pas ça. L’industrie du disque est de plus en plus basée sur la popularité de masse.

Mais selon toi, la musique peut changer la société ?
Non. Moi, je ne fais que me plaindre. La musique me permet d’extérioriser une certaine frustration. Je suis surtout très cynique. C’est un vrai challenge de garder le sourire tout le temps quand même. Pour moi en tout cas. Le truc, c’est qu’il faut accepter. Demain est un autre jour.

Mais la musique a du pouvoir sur les kids ?
Personnellement, je pense que la musique a été utilisée pour emmener la jeunesse dans une direction très négative. Les valeurs vendues dans la musique actuelle sont hypocrites et dangereuses, emmenant la jeunesse dans des perversions sexuelles, des consommations de drogues et tout autre dérive. Dans quelque chose de très destructeur en tout cas. Ça sonne presque comme une conspiration de masse.

prong

Dans un an, tu auras un nouveau président aux Etats-Unis… Tu en attends quelque chose ou tu ne crois plus à la politique du tout ?

L’un ou l’autre candidat, ça sera quand même toujours la même chose. Ils nous font croire que dans cette société fasciste, nous avons le choix, alors qu’ils se grattent mutuellement le dos en privé.

Qu’est ce qui te motive dans la vie ?
J’ai quelques buts personnels dans ma vie. J’aime confronter mon caractère aux épreuves que la vie m’amène. Mais dans un but très saint.

Es-tu blasé du music business ?
Cela m’a appris qu’il est impossible de changer les gens, qu’ils sont enfermés dans le chemin qu’ils se sont tracés. Et plus tu t’acharnes, plus tu te détruis toi-même et au final, tu n’avances pas. Tu te retrouves entouré d’égoïstes, qui selon toi, n’ont pas la bonne vision des choses. Tu t’acharnes au début à essayer de les changer, après tu abandonnes.

Tu penses qu’avec ce nouveau disque, tu vas avoir les mêmes fans que pour l’album Beg to Differ ?
Je ne sais pas. Je ne calcule pas ces choses-là. Je suis content d’ailleurs de ne pas me poser ces questions là. ..

Mais tu sais que tu as quand même une base de fans fidèles ?
Je ne sais pas. Les gens me disent des choses, mais je ne sais pas. Pour moi, tout est relatif. C’est très difficile de catégoriser ce genre de choses. Ce n’est pas saint de réfléchir à ça.

L’album sort chez 13th Planet, tu joues aussi avec Ministry… Comment décrierais-tu ta relation avec Al Jourgensen ?
C’est une relation de travail, dans laquelle je fais toujours du mieux que je peux. Je n’hésite pas à donner mon point de vue sur les choses avec lui, je ne m’écrase pas. Je ne lui embrasse pas les fesses, il n’embrasse pas les miennes non plus. C’est pour ça peut-être aussi que les deux derniers albums de Ministry sont bons, car ce n’est pas qu’une seule vision, mais celle d’un groupe. Al est un producteur incroyable.

Je pensais que c’était quand même plus qu’une simple relation de travail, plus une vraie amitié…
Ah oui, quand même un peu plus, c’est sûr. Mais on vit loin l’un de l’autre.

Autre chose, mais ce qu’il y a de bien, c’est que tu n’as jamais abandonné Prong, malgré les problèmes et tes projets parallèles.
Oui c’est vrai.

… sauf entre 1996 et 2002 bien sûr !
(rire) Oui, là, j’avais abandonné, c’est vrai. C’est une période où j’ai beaucoup appris. Je voulais abandonner, mais je ne me suis jamais vraiment échappé de Prong.

Site : www.prongmusic.com