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Troisième album pour le groupe français, et troisième réussite ! La sortie de The Water Fields a fait monter une certaine excitation à la rédaction, et après de multiples écoutes, l’attente s’est avérée être payante ! Le groupe reste solide, créatif, et surtout continue de progresser. The Water Fields est plus direct et charme par ses ambiances et ses mélodies cristallines. Rencontre avec Manu (chant) pour nous éclairer…

Interview parue aussi dans le Metal Observer FNAC n° 11 de Sept. 2007

Entretien avec Manu (chant) par Geoffrey & Will Of Death
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J’aimerais que tu reviennes un peu sur l’après The Perpetual Motion : les ventes, les réactions des gens, la tournée, tout ça quoi…
Avec cet album, on a passé un cap en live puisqu’on a fait env. 50 dates, ce qui n’est pas mal, d’autant qu’on a fait de beaux festivals. On a aussi tourné avec Epica ; certains se sont demandés ce qu’on foutait sur la même affiche qu’eux mais finalement, les gens ont apprécié et les membres d’Epica sont en plus des gens adorables. Des choses sont aussi en préparation pour le nouvel album mais je préfère ne rien dire pour le moment car depuis que je suis dans la musique, environ deux tiers des plans qu’on nous a proposés sont tombés à l’eau. On est un peu blasés à ce niveau et on préfère donc rester prudents. Personnellement, j’aime toujours cet album bien que j’ai eu énormément de mal à prendre du recul après son enregistrement. Là, je suis un peu dans le même état d’esprit par rapport à The Water Fields car on a abattu une telle somme de boulot et il y a tellement de détails que je suis incapable de te dire si on a fait mieux. Les autres membres du groupe en sont par contre complètement convaincus. J’espère qu’ils ont raison (rires) !

Nous, ça fait 10 fois qu’on l’écoute et je peux te dire que c’est le même plaisir à l’écoute… Quel était votre état d’esprit quand vous avez commencé à composer The Water Fields ?
C’est compliqué car quand nous avons commencé à composer, Nicolas était encore dans le groupe. Le truc, c’est qu’après The Nameless Disease, on a tellement été pris à la gorge pour faire The Perpetual Motion, que dès le mix de cet album, j’avais obligé Nico à trouver des plans alors que j’étais encore en studio (rires) ! Ca a commencé donc tôt mais ça s’est vite interrompu car pas mal de dates se sont présentées à nous et il n’a pas été très facile de caler beaucoup de répétitions en plus car nous avons tous une vie de famille « normale » à côté. Nico a alors senti qu’avec l’arrivée d’un enfant, il n’allait pas pouvoir gérer tout en même temps et a décidé d’arrêter. Moi, j’ai fait le choix d’être un père indigne, c’est pas pareil (rires)! Ca a été dur le départ de Nico car on était super complices.

Tu as eu peur de ne pas pouvoir gérer ?
Oui, j’ai craint de ne pas pouvoir gérer la composition seul. Il a donc fallu auditionner et on a fini par dénicher Gilles, qui a une autre façon de travailler. Ceci dit, on a cherché longtemps car on voulait un gars qui ait le même état d’esprit que nous car on n’est pas du tout rock n’ roll. On est très tranquilles en fait ; des gratteux étaient bons mais n’auraient pas pu se fondre dans la masse car ils pensaient plus à la fête. Il me fallait aussi quelqu’un qui sache composer. Ensuite, il nous a fallu s’adapter un peu à son style car il vient plus du doom et du goth. Bien que la base soit le Metal, perso, j’ai plus d’influences rock/pop…  

Oui, ça a pris du temps quoi…
D’autant plus que la compo a été travaillée dans les moindres détails, note par note. Ce n’est pas très folichon d’ailleurs comme méthode mais le résultat, lui, l’est ! Le but est de ne rien regretter à la fin et du coup, c’est un boulot monstrueux. En gros, trois morceaux avaient déjà été composés avant le départ de Nico et d’octobre à début juin, on a bossé comme des dingues pour finaliser l’album. Les seules choses qui nous ont arrêtés ont été les naissances de nos deuxièmes enfants, à moi et à Gilles… 

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J’ai souvent entendu dire que vous étiez les Opeth français, mais il y a toujours eu beaucoup de différences et c’est encore plus vrai sur cet album…
C’est clair ! Déjà, on est bien meilleurs musiciens qu’eux (rires) !! Nos similitudes viennent des changements brutaux voix death / voix claires et passages riffs brutaux / riffs calmes. Opeth est beaucoup plus folk et prog que nous.

Ouais, mais le « prog », c’est devenu vraiment un fourre-tout maintenant…
Nous, sur The Perpetual Motion, on avait un côté prog plus prononcé que sur The Water Fields, mais à la Pink Floyd, c’est-à-dire par l’utilisation de samples bien ambiants. Là, je n’avais plus trop d’idées et du coup, on a plus travaillé les mélodies au piano. Je voyais plus des ambiances prog à la Pain Of Salvation, plus fouillées, qui sont plus là pour déranger l’oreille de l’auditeur, pour qu’il s’intéresse encore plus à la musique.

Donc, vous avez une nouvelle fois bossé avec Andy Classen pour la prod. Pourquoi lui ? Avez-vous bossé différemment ?
Pour The Nameless Disease, on faisait plus connaissance. Avec The Perpetual Motion, on s’est vraiment bien compris et on a poussé les choses plus loin ; là, il y avait un côté encore un peu plus rassurant d’aller là-bas, d’autant que nous sommes arrivés avec un nouveau line-up. Andy était en plus vraiment très motivé pour rebosser avec nous. Au niveau du son, nous avons eu la chance d’avoir du matos encore plus performant grâce à nos endorsements…

C’est vrai que le son de batterie est totalement monstrueux, là, et on note aussi un chant death peut-être un peu plus « naturel »…
Pour The Perpetual Motion, j’ai eu beaucoup de soucis avec le chant death car je n’avais jamais pris de cours de chant. Quand il a fallu faire toute une série de dates, j’ai connu pas mal de problèmes, à devoir prendre de la cortisone à qui mieux mieux… J’ai carrément du faire de la rééducation vocale avec un spécialiste ; quand j’ai commencé à pousser les premiers cris death devant elle, elle m’a dit que ce n’était quand même pas très bon et que j’allais me détruire la voix (rires). Du coup, j’ai développé un chant plus au niveau du ventre, plus lâché et j’arrive à faire des notes plus longues. J’ai changé un peu de timbre et du coup, là, ma voix death est moins grasse, moins grave que sur l’album précédent. 

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Je trouve qu’il y a aussi plus de chant clair, avec un gros travail sur les mélodies, même si c’était déjà un des points forts de votre musique.
Ouais, bon, disons qu’il y a un peu de Muse, de Radiohead et d’Anathema qui sont passés par là (rires) ! Le pire, c’est que les autres membres du groupe ont découvert ce que j’avais fait qu’une fois revenu du studio ! Quand je suis rentré d’Allemagne avec l’album sous le bras, ça a donc été la surprise pour eux… Andy a en plus demandé à Fouad et à Vincent de partir pour le mix, sinon, on n’aurait entendu que leurs instruments (rires) ! Quand je m’entraînais chez moi avant l’album, je chantais parfois trop haut et Andy a recadré ça ; ça s’est fait très vite au final. J’aime assez le résultat final mais encore une fois, je manque totalement de recul…Si tu me dis que le résultat est meilleur, tant mieux, j’espère que les gens penseront comme toi.

Ce qui est bien avec vous, c’est que tout n’est pas immédiat justement…
Oui, on a bossé les claviers à mort, on a mis beaucoup plus de pistes de guitares, jusqu’à 14 pistes en même temps pour un titre… On trouve que c’est cette superposition de détails qui fait qu’un titre ne va pas s’épuiser après quelques écoutes, bien qu’il soit primordial d’avoir une ligne directrice. D’où l’intérêt d’avoir un super pro au mix, puisqu’un titre a 60 pistes en tout (rires) quand on ajoute tous les instruments…

On a l’impression que vous avez poussé les extrêmes dans les deux sens à fond sur cet album : plus de death et plus de mélodies aussi…
Je ne suis pas forcément d’accord avec toi : j’ai plus l’impression que The Perpetual Motion était comme ça. Je sens moins cette alternance que tu décris sur le nouvel album…

Vous nous proposez une nouvelle fois un concept album…
Le concept tourne autour de la manière dont on a de se mentir tous à nous-mêmes. The Water Fields (les Champs d’eau) sont en fait un lieu imaginaire dans lequel on va se réfugier plutôt que de faire face aux problèmes, un endroit pour s’extraire du monde qu’on a du mal à supporter. Après, chacun se fera son idée… Créer un concept est toujours difficile sauf que là, je me suis limité pour ne pas créer forcément de liens entre tous les titres…

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Quelles sont vos attentes pour cet album ?
La gloire absolue (rires) ! Non, mais on aimerait passer cette fois-ci un cap encore plus important à l’échelle européenne ; c’est assez bien parti car on a des offres intéressantes. Je pense que la France n’est absolument pas le bon pays pour notre style de musique. C’est malheureux mais c’est comme ça. Contrairement à la France, en Allemagne ou aux Pays-Bas, le Metal n’est pas vu comme une musique de parias par les médias… Même Gojira qui fait des tournées de fou est un groupe underground en France. Je me rappelle de nos premières chroniques : « on n’a pas l’impression que cet album vienne de France ! C’est trop bon… ». On passait pour des bouseux (rires) !

Y a un groupe qui te troue le cul en France ?
Oui, Gojira justement. Ils sont super pros, ont un style qui déglingue, ils ont tout ! Ils bossent comme des dingues… La 1ère fois que je les ai vus en live, ils s’appelaient encore Godzilla, c’était en 1999, et ils m’avaient déjà mis une claque alors que je n’avais jamais entendu parler d’eux… Dagoba est devenu aussi une vraie machine de guerre après leur tournée avec In Flames et Sepultura. Klone, Deviance, j’aime aussi beaucoup ! Le niveau s’est quand même bien élevé en France.

Votre style est plus émotionnel ; il y a des fins de morceaux assez incroyables. Vous y pensez quand vous composez ?
Non, ça vient comme ça, si je commence à réfléchir à tout, je vais péter un câble. Je suis juste d’une grande exigence : on bosse jusqu’à ce qu’on écrit plaise à tout le monde. Je suis incapable de composer sur commande.

Comme le Metal Observer est distribué dans un magasin de disques, es-tu optimiste pour l’avenir du disque ?
Non, pas du tout ! Mon petit frère de 19 ans n’a jamais acheté un disque de sa vie ; ça n’a pas de valeur particulière pour lui. La nouvelle génération s’en fout d’avoir le livret ; ce qui compte est de pouvoir aller sur Myspace ou de blinder son lecteur mp3. Le CD sera un objet culte dans 20 ans ; par contre, je pense que le format album de 45 minutes n’est pas prêt de disparaître. Après, sous quelle forme, on verra…

Le téléchargement est aussi un problème mais en même temps, ça oblige les groupes à un certain niveau d’excellence pour qu’on achète le disque…
Euh… oui, je suis d’accord ‘rires) !

Un dernier mot ?
J’espère que tous les chroniqueurs seront d’accord avec toi et qu’on aura de bons retours. Pour l’instant, ça s’est assez bien passé pour nous depuis le début de notre carrière, d’autant que ça me touche toujours quand on nous casse. Pourvu que ça dure dans le positif ! On a bossé comme des porcs sur cet album et on en est fiers !

Site : www.theolddeadtree.com