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C’est avant le premier concert de la tournée Black Crusade, au Splendid de Lille, que nous avons eu la chance de rencontrer Robb Flynn. Première et quasiment unique interview de la journée, le frontman de Machine Head est enclin à parler, nous fait ressentir une bonhomie assez rare chez lui et nous démontre que le groupe est prêt à monter sur le planches pour une tournée qui s’annonce grandiose. Plutôt que de lui poser les questions classiques de la genèse du dernier album de Machine Head « The Blackening », nous avons préféré revenir sur le groupe en lui-même et les différents attraits de son leader charismatique… Enjoy…

Interview à paraître également  dans le Metal Observer FNAC n°14 de Déc. 2007 (en couv')

Entretien avec Robb Flynn (guitare / chant), par Pierre Antoine et Geoffrey
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Comment te sens-tu quelques heures avant le début d’un show comme ce soir ?
Pour tout dire, je me sens super bien en fait. C’est plutôt rare. J’ai pu avoir dix heures de sommeil la veille donc ça va très bien. D’habitude, je suis crevé…C’est deux heures de sommeil maxi, donc là, c’est byzance, crois-moi…Et là, c’est le premier jour de cette tournée qui va être chaotique donc il faut qu’on soit à fond pour bien commencer.

Ca ne t’embête pas trop de faire des interviews avant un show ?
Ca va, c’est mon boulot…Ca dépend des journalistes en fait (rires…)

Tu penses que Machine Head a encore besoin comme ça de faire des interviews et faire parler de lui où ça pourrait se faire sans… tout naturellement ? Vous n’avez plus rien à prouver…
Merci… mais tu sais, oui, nous en avons besoin. Nous faisons ça depuis 13 ans maintenant et beaucoup de gens qui écoutaient ce qu’on faisait il y a 13 ans n’écoutent plus ce genre de musique actuellement. Il faut donc constamment te montrer, prouver que tu existes. On a beaucoup de fans qui nous suivent de façon minutieuse mais aussi d’autres qui sont volatiles…Ils vont et viennent autour de Machine Head. Est-ce que j’aime toutes les interviews que je fais ? Bien sûr que non, combien de fois les mecs qui m’interviewent ne connaissent rien au groupe et font semblant… ça me tue…

Ne t’inquiètes pas, on fait ça depuis 15 ans donc on connaît un peu Machine Head…(rires) Comment imagines-tu ce Black Crusade Tour ?
C’est une super affiche et franchement, ça va être énorme. C’est le plus gros truc après le « Clash Of The Titans ». Tous les shows en Grande Bretagne sont sold-out, Paris est sold-out, c’est dingue, je trouve ça fou !

Qu’est ce que ça fait d’être le Headliner ?
Nous sommes co-headliners en fait avec Trivium en Grande-Bretagne. En France, on est Headliner oui, mais tu sais, on fait tout le temps ça (rires…). Non, quoiqu’il en soit, c’est vraiment cool…

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Tu te souviens de ta dernière venue au Splendid  de Lille ? C’était la folie…
Carrément, il faisait super chaud. Je m’en souviens à mort, c’était avec Kill 2 This. Y a un des mecs qui est venu sur scène à poil, il a fait un slam et quand il a sauté, tout le monde s’est écarté…C’était grave putain…(rires).

Tu aimes Arch Enemy qui sera sur cette tournée du Black Crusade ? Et si oui, ton album favori ?
Bien sûr, j’adore Arch Enemy. C’est un groupe de killers. J’adore Anthems mais depuis que j’ai écouté Doomsday Machine, je crois que je craque pour celui-là.

Tu continues toujours à écouter de nouveaux groupes ? A découvrir ou te réserves tu ton temps pour les classiques uniquement ?
J’adore découvrir de nouveaux groupes, découvrir des nouveaux albums et prendre mon pied. J’achète toujours des CD’s, je préfère ça que tout télécharger sur mon Ipod. J’aime le concept du CD, de la pochette, découvrir plus sur l’univers d’un groupe et sa musique. J’achète certainement plus de CD’s maintenant que le téléchargement existe. Par contre oui, j’écoute toujours autant de vieux groupes…

La dernière fois qu’on vous a vus, c’était au Hellfest… James Labrie (Dream Theater) nous a précisé que c’était plus l’enfer que la fête…C’est aussi ton sentiment ?
(NDLR : Robb est mort de rire…) C’est plutôt vrai. Non, pour nous, ça été bien. Enfin bien sûr, il a plu tout le temps, les douches, la bonne bouffe sont à des millions de km, la scène a pris feu, plein de groupes n’ont pas joué mais ça n’a pas affecté notre show. Pour nous, ça s’est bien passé. C’est con pour Lamb Of God…En même temps, tous les groupes ont été payés, donc même si on n’avait pas joué, on aurait eu notre argent… (rires). En dépit de la pluie et de la boue, c’est un putain de fest, notre show particulièrement l’a fait à mort ! Faut pas oublier que si les groupes se plaignent, les fans vivent ça cent fois plus fort… C’est horrible pour eux… Nous avons une dressing room, nous avons un bus, nous avons une pièce chaude. Tous les kids qui se les gèlent dehors et attendent tous ces groupes…pfff…on se doit de donner un super show.

Vous reviendrez alors ?
Oui bien sûr, carrément.

C’était courageux de jouer « Descends The Shades Of Night » à ce festival si « métal »… ? La plupart des groupes se concentrent sur leurs chansons heavy…
(NDLR : Long silence) On s’en fout, on joue ce qu’on veut. Et puis tout le monde participe sur cette chanson. Les gens adorent la chanter…On n’est pas là pour faire du Slayer à tout va ! Nous ne sommes pas Slayer, nous ne l’avons jamais été.

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Comment vont vos relations  avec Slayer justement ? Le passé est oublié ?
Tout va bien mec…Il se pourrait même qu’on refasse une tournée ensemble un jour…

Revenons un peu sur The Blackening…Qu’est-ce que ça fait de savoir que beaucoup considèrent cet album comme le meilleur album de thrash de la décennie… ?
Je ne sais pas…Je ne veux pas choper la grosse tête (rires…). Nous sommes humbles et surtout fiers de ce qu’on a accompli et que tant de gens nous suivent. C’est bizarre d’avoir autant de succès après 6 albums, après toutes ces années et ces merdes qu’on a vécues. C’est bizarre car c’est un album très risqué, pas conventionnel du temps. On ouvre l’album avec une chanson de 10 minutes…(rires). On n’avait jamais fait ça avant, on avait jamais eu de chansons de 10 minutes. On a été album de l’année dans plein de magazines et c’est forcément plaisant. Ca nous rend plus conscient que nous n’avons pas à faire rentrer la musique dans une boîte, dans des cadres précis régis par les maisons de disque, MTV ou je ne sais quoi…Que les gens suivent un album risqué, je trouve ça fabuleux…C’est un album controversé, les Etats-Unis ont du mal avec nos paroles, les ultra conservateurs surtout…Donc ça réconforte…

Tu écris souvent sur des choses qui t’ont touché étant jeune, qui t’ont fait souffrir…Est-ce que Machine Head est ta thérapie ? Continueras-tu à hurler ta rage jusqu’à la fin ?
(NDLR : Long silence entrecoupé d’hésitations..) Oui, je pense…(rires). Ca m’aide bien sûr mais ça a l’effet contraire de temps en temps. Quand j’écris des chansons de ce type, très personnelles, je réouvre une cicatrice. Ca doit sortir de moi…Dans ce sens, c’est bien car j’expulse tout ça, cette rage comme tu l’as dit… Mais parfois tu dois rejouer cette chanson en tournée, tous les soirs, et tous les soirs, tu repenses à cette merde que tu as vécue et tu te retrouves comme un con à souffrir, ça c’est très dur. Je n’étais pas prêt pour ça quand on a commencé à faire des chansons plus personnelles. Durant la dernière tournée, pour « Left Unfinished », par exemple, je me décomposais sur scène…J’étais embarrassé, je n’allais pas pleurer sur scène quand même (rires…). Donc c’est un peu le ying et le yang tout ça…

Tu as toujours des propres démons ?
Bien sûr, si c’était si facile d’écrire des chansons pour les oublier, il faudrait le conseiller à tous les dépressifs. Mais je travaille dessus, je m’efforce chaque jour de les combattre pour tirer le meilleur de moi-même.

Depuis Through The Ashes Of Empire, il y a un vrai retour de Machine Head. The Blackening a d’ailleurs enfoncé le clou. Vous êtes enfin de nouveau sur le devant la scène. Vois-tu Through The Ashes… comme une renaissance ?
Tu sais, les fans ont toujours été là avec nous, la presse nous a lâchés. Même quand on était « mort », on faisait sold-out dans plein de salles. On est peut être revigoré à mort mais il n’y a aucune renaissance. Que ce soit Machine Head ou ses fans, personne ne s’est enfui. En tant que musicien, oui, je suis revigoré car je me suis remis en question, j’ai essayé plein de trucs donc, oui, je revis et j’ai progressé. Travailler sur des choses qu’on n’aurait jamais tentées auparavant, bien sûr, c’est revigorant, ça nous fait évoluer. Mais je ne comprends pas que les gens voient ce qui nous arrive comme une renaissance, seule la presse nous avait lâchés.

Toutefois, contrairement à l’Europe qui vous a toujours soutenus, aux Etats-Unis, ce fut plus difficile…Throught The Ashes Of Empire n’a été distribué que plusieurs mois après sa sortie européenne…
Du point de vue business, il y a évidemment une renaissance. Mais c’est un mythe populaire de croire que Machine Head a été énorme puis s’est cassé la gueule. En Europe, oui, mais c’est tout le contraire aux Etats-Unis. En dehors de la Bay Area où nous étions connus, quand on remplissait des salles comme l’Elysée-Montmartre, notre plus gros show aux Etats-Unis,  c’était 400 personnes…La plupart des shows, c’était 40 personnes, alors après, l’Europe, ça te met une claque…Donc aux Etats-Unis, Machine Head ne fait que grossir au fur et à mesure. On était 24ème dans les charts la première semaine de vente de Burn My Eyes en Angleterre. Sur tout le continent américain, la première semaine, c’était 110 albums vendus…(rires). Tout le monde s’en foutait à mort de Machine Head. Ca a donc été une grosse bataille pour remporter les Etats-Unis…Vraiment.

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Comment décrirais-tu tes relations avec les médias et le music-business ?
C’est une relation d’amour et de haine (rires). Je comprends que c’est le boulot des médias de dire qui est bon ou pas…Et encore une fois, c’est encore différent aux Etats Unis par rapport à l’Europe…Dans chaque pays européen, vous avez à peu près 4 à 5 gros magazines qu’il vous faut à tout prix faire… Aux Etats-Unis, c’est 5 magazines pour tout le continent, donc oui, si on ne parle pas de Machine Head, c’est mort. Si un journaliste dit que ça c’est cool ou pas, y a peu de chance de prouver le contraire, c’est très sectaire. La scène métal l’est beaucoup aussi. Tu ne fais pas jouer deux groupes différents aux Etats-Unis, tel groupe doit jouer avec tel groupe ou le concert ne se fera pas. Je suis si surpris que les shows en Europe comme le Hellfest soient si variés…Tous les groupes font du métal mais ça va du black métal au thrash en passant par le heavy, tu ne verrais jamais ça aux Etats-Unis. Chaque groupe est dans sa petite caste, sa boîte dans laquelle on le fout et après, c’est terminé. Les groupes ne se mélangent pas.

Et vous, vous vous mélangez, avec des groupes français par exemple…
Et oui, je vois de qui tu parles, Gojira. J’adore ce groupe et ce sont des mecs géniaux, franchement je les adore !

On parlait de Burn My Eyes. Quand va sortir l’édition spéciale de son anniversaire qui était prévue sous forme de DVD ?
Ca ne me dit rien (rires). Vous parlez du show d’anniversaire où on a joué tout l’album et que certains voulaient voir en DVD ? Rien n’est prévu en fait. On en a parlé avec Roadrunner mais rien de prévu en fait. Je ne peux pas vous annoncer de scoop les gars..(rires).

Vous rejouerez un jour Burn My Eyes en entier sur scène ?
Non je ne pense pas. C’était un moment spécial. C’était l’anniversaire des 10 ans. On l’a fait 2 fois, une fois aux Etats-Unis et une fois en Angleterre. Aux Etats-Unis, ils en avaient fait tout un plat mais en Angleterre, personne n’était au courant, on l’a fait sans le dire à personne. Les kids ne le savaient pas et quand tu vois des gamins de 10, 15 ans devant la scène, c’était marrant, ils ne connaissaient pas les chansons !! C’était super surprenant quand je demandais aux gens de chanter et qu’ils faisaient semblant. (rires). Le show aux Etats-Unis était spécial, c’était le jour exact de la sortie 10 ans après, tout le monde était à fond. Les gens ont rendu ce moment aussi super spécial. Effectivement, ça rendrait bien sur DVD.

Tu vois toujours Chris Kontos (batteur sur Burn My Eyes) et Logan Mader (Lead Guitar sur Burn My Eyes) ?
Logan et moi sommes toujours super amis. Il est complètement sobre maintenant donc c’est super. J’ai revu Chris de temps en temps mais rien de sérieux…

Une question plus personnelle. Tu penses être un meilleur chanteur ou un meilleur guitariste ?
Je suis un super guitariste rythmique, je suis un vrai bon chanteur mais je suis surtout un putain de bon frontman. C’est ça que je sais faire le mieux. J’analyse beaucoup Chris Cornell (rires). C’est sincèrement ça mon atout. Je n’ai jamais travaillé dessus mais j’ai toujours voulu être sur scène et ça me fait du bien d’être sur scène. Il y a tellement de meilleur chanteur ou meilleur guitariste que moi, mais quand il s’agit de mettre le feu, je fais partie des meilleurs !

Tu peux nous expliquer ce qu’est le Irish Car Bomb ?
(rires…) Non, le Russian Car Bomb. Enfin, le Irish existe mais je préfère la vodka. En fait, tu prends une pinte de bière brune mais pas trop forte, genre Guinness. Tu prends un shot de vodka, du met du Bayley’s et tu bois le tout. C’est énorme. La force de la bière et de la vodka sont atténués par le Bayley’s, franchement, il faut se boire ça la prochaine fois…

Site : http://www.machinehead1.com/