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On ne va pas le répéter à chaque fois, s’épancher sur le metalcore et ses dérives. A la rédac’, on arrive à saturation de tous ces groupes. Il y en a trop, on ne sait plus quoi dire pour en parler. Alors quand on a la chance de discuter avec les pionniers du genre (avec d’autres, je sais) comme Heaven Shall Burn, on ne se prive pas. Surtout avec ce groupe qui n’a jamais inclus le mot « compromis» dans sa musique, et qui est resté fidèle à ce mélange atypique de thrash, de death et de hardcore.

Interview à paraître également  dans le Metal Observer FNAC n°15 de Janv. 2008


Entretien avec Mark, par Geoffrey
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Quand pourrons-nous voir une vidéo de bonne qualité de votre dernière prestation au Wacken Festival, où la foule est devenue complètement folle ?
(rire). Une bonne vidéo ? Et bien écoute, il y aura un bonus DVD avec le prochain disque avec l’intégralité de ce concert. Le public était complètement fou. Alors plutôt que de le montrer sur Youtube, on a décidé de donner aux gens de meilleures conditions pour le voir.

Revenons d’abord sur le re-mastering sorti cet été de «Whatever It May Take», l’un de vos meilleurs albums, et surtout l’un des meilleurs albums de metalcore jamais composé...
Merci (rire)

L’album souffrait à l’époque d’un son pas vraiment à la hauteur. Si vous aviez eu de meilleurs moyens à ce moment-là, penses-tu que les choses auraient pu être plus rapides pour le groupe, que vous seriez devenus plus gros ?
Je ne pense pas. Je pense que tout était bon au moment de ce disque, quand nous l’avons enregistré. Mais le problème n’était pas tant le son, mais la façon dont nous jouions à cette époque. On ne jouait pas si bien, et surtout, avec un meilleur son, on aurait entendu toutes nos erreurs. Alors quand le disque est sorti, le son n’était pas bon, mais il était brutal, frontal, exactement comme nous l’étions à l’époque. Aujourd’hui, nous jouons un peu mieux (rire), nous avons un meilleur studio, nous avons donc pu refaçonner le disque de meilleure manière. Et avec ce ré-enregistrement de certaines parties, la re-masterisation d’autres, les gens redécouvrent complètement ce disque.

De toute façon, tu es d’accord avec moi pour dire que c’est un de vos albums les plus percutants ?
Je l’espère (rire). Demande à une mère quel enfant elle préfère, c’est impossible. Mais c’est un album que j’aime beaucoup, avec de très bons morceaux. A chacun de nos concerts, on joue au moins 3 ou 4 morceaux de ce disque de toute façon.

Parlons un peu de ce nouveau disque. Quelques morceaux vont surprendre les fans, comme cette partie dance-floor sur « Murder of the Murderer », ou encore « Black Tears », très inspiré par la scène death mélodique suédoise. Tout cela parmi d’autres petits détails... Penses-tu qu’il était temps pour le groupe de prendre des risques ?
Oui, je pense que tu as raison. Même si je ne pense pas que ce soit une partie dance-floor (rire), mais je vois ce que tu veux dire. Cette fois-ci, nous voulions changer un peu. Nous avions ça à l’esprit depuis longtemps, de tenter de nouvelles choses. On y avait pensé avant, mais sans jamais vraiment réussir à concrétiser réellement nos envies. Les choses ne donnaient pas vraiment ce qu’on escomptait, parce qu’on se forçait à essayer. Cette fois-ci, tout est venu naturellement. Bon, je pense que tu reconnais toujours qu’Heaven Shall Burn joue sur ce disque, mais avec beaucoup plus de choses à découvrir, ce qui rend le disque plus intéressant. Il était temps de changer un peu, je suis d’accord avec toi.

Et donc, comment s’est passée l’écriture cette fois-ci ?
Nous avons fait quelques festivals l’été dernier, puis une petite tournée. Nous nous sommes vraiment beaucoup amusés. Nous sommes entrés directement après en salle de répète, puis en studio, poussés par cette énergie que nous avions eue pendant ces concerts. Mais c’était incroyable, les idées fusaient et les morceaux s’enchaînaient. Tout était très spontané. Et je pense que l’on entend vraiment cela sur cet album.

Vous avez réussi à développer votre propre son. Comment s’est passé le studio ?
Cette fois, nous avons vraiment essayé de pousser nos limites techniques au maximum, et de jouer de nos instruments à la perfection. Parce que c’est toujours important. Quant au travail en studio en lui-même, nous n’avons pas trop changé nos habitudes par rapport aux précédents disques. On a d’abord enregistré les parties de batterie. Mais nous ne voulions pas que ce soit quelque chose de contraignant, comme s’enfermer 3 semaines matin et soir pour finir l’album. On y allait quand on avait vraiment envie d’y aller.  Donc il y a des jours où nous ne faisions rien, car on ne le sentait pas.

Combien de pistes cette fois-ci pour le chant, pour lui donner ce timbre si particulier ?
2 pistes en permanence, et parfois 3 ou 4.

Pareil pour les guitares ?
Les parties de guitare rythmique sont toutes doublées, les miennes et celle d’Alex, sur lesquelles on ajoute les lignes mélodiques.

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Est-ce un concept album ?
Oui et non. Chaque chanson a son propre sujet, son propre développement, toujours connecté à la réalité. Mais avec un sujet global sur les Iconoclast, des guerriers qui se battent contre toutes les idioties décrites dans les morceaux.

Es-tu, comme dans les paroles du premier morceau, la résistance ultime à quelque chose («We are the final resistance») ?
Nous sommes tous résistants à quelque chose. Toi aussi. Il y a des guerres partout. Comme la guerre entre l’être humain et la planète sur laquelle il vit ! Nous sommes la dernière résistance car nous sommes la dernière génération à pouvoir changer les choses.  Il sera déjà trop tard si nos enfants veulent changer les choses aussi. Nous sommes donc les derniers à pouvoir faire évoluer la situation.

Quelle est ta vision de notre société moderne ?
Je pense qu’il y a beaucoup de choses qui ne vont pas. Bien sûr, nous, les pays de l’Ouest, nous vivons avec un confort que nous n’avions pas auparavant. Quand je vois beaucoup d’autres pays du tiers-monde qui souffrent parce qu’ils ne sont pas libres, quand je vois la différence entre les très riches et les très pauvres... C’est comme un système de balance, qui nous permet à nous d’être bien. Mais ce n’est pas juste. Les pauvres deviennent de plus en plus pauvres, les riches de plus en plus riches. Et cela ne semble pas changer. Et quand on en arrive à un point où les pauvres n’ont rien d’autre à perdre que leur vie, qu’ils se moquent de perdre leur job car ils n’en ont pas, ils n’ont pas peur de devenir criminel. Il n’y a plus de repères. Donc oui, ça va mal.

N’as-tu jamais pensé parler d’amour dans vos chansons (rire) ?
(rire). Non, jamais. Le jour où nous parlerons d’amour dans nos chansons, Cannibal Corpse parlera de sucreries (rire). J’écrirai peut-être des chanson d’amour dans un autre groupe, mais pas dans Heaven Shall Burn (rire). C’était une bonne question (rire).

L’album s’appelle «Iconoclast Pt 1», y aura-t-il vraiment une deuxième partie ?
Oui, je pense. Nous avons déjà des idées pour une suite. De là à ce qu’il y ait une troisième et une quatrième partie, je ne sais pas encore. Je sais pour une deuxième partie, par contre je ne m’avance pas pour les autres.

Qu’est ce qui a changé, selon toi, dans la scène metalcore depuis vos débuts ?
On vend plus de disques, on donne plus de concerts. Mais je suis surtout content des choses qui n’ont pas changé.  Je vois encore aujourd’hui des amis et des fans qui étaient là au début et qui viennent toujours à nos concerts. Beaucoup de nouvelles personnes écoutent ce style de musique, mais je suis heureux de voir que les gens qui étaient là au début le sont encore. La scène grandit et perdure, et ne grandit pas en se coupant de sa base. On se moque de ce qui change, on fait toujours ce qu’on a envie de faire. Nous sommes comme ça, c’est quelque chose que nous aimons, que ce soit devant 20 personnes ou 20.000.

Et que penses-tu de tous ces groupes de fashion-core qui polluent la scène metalcore ?
Ça me rappelle les années 80, avec les groupes de glam et leurs coupes de cheveux faites à la laque comme Poison, Motley Crüe ou Winger. Tous ces groupes pseudo émo sont un peu comme du plastique, sans âme et en oublient les vrais sentiments.

Donc les groupes qui incluent des passages en chant clair ne doivent pas te plaire plus que ça.
Non, si c’est bien fait, ça va. Des groupes comme Killswitch Engage, ou encore As I Lay Dying, le font très bien. Mais Heaven Shall Burn ne le fera jamais, car ça ne colle pas à notre musique. Peut-être dans un morceau plus rock.

Mais c’est mieux avec les filles après un concert (rire)…
Oui (rire), mais des fois, tu as besoin de plus d’agressivité.


Heaven Shall Burn – Iconoclast Pt 1
Century Media Records

Site : www.myspace.com/officialheavenshallburn