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Généralement, nous sommes assez fermés d’esprit quand des groupes essaient de se la jouer second degré. Cela nous lasse très vite. Pourtant, Ultra Vomit nous a bluffés, et surtout beaucoup fait rire. Ça ne vole jamais très haut, mais nous, ça nous fait rire. Et si les textes sont très désinvoltes et puérils, musicalement, le groupe met une claque à beaucoup de formations. 

Interview à paraître également  dans le Metal Observer FNAC n°18 d'Avril  2008

 Entretien avec Le Roi Fetus (guitare / chant)  – Par Geoffrey & Luna
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Quel est votre lien particulier avec les canards ?
Bah, c’est mon père en fait, c’était un canard, donc on est un petit peu rattachés à ce petit animal. Ensuite, y a un lien mystique, ça vient du fait qu’on ne voit pas leurs pattes quand ils nagent. Je suis vachement attaché à ce truc-là car quand j’étais petit, j’ai toujours cru qu’ils glissaient sur l’eau de manière un peu magique et un jour, l’eau était un peu plus claire - parce qu’il faut avouer qu’en général les mares aux canards c’est sombre - et là j’ai vu des pattes en-dessous qui battaient dans l’eau.

T’avais quel âge à peu près ?
7 ans et demi, ça m’a bloqué, j’ai tout de suite redoublé ma 5ème, j’avais un peu d’avance. A part ça, c’est la maladie mon problème avec les canards : tout le monde le connaît, j’ai fait une chanson dessus parce que je veux tous les canards vivants qui existent.

C’est le morceau le plus personnel de l’album ?
C’est un petit peu un exutoire, on décharge toute cette frustration du fait de ne pas posséder tous les canards, c’est une maladie extrêmement contagieuse qui fait que tous les membres du groupe sont déjà contaminés et bientôt tous les auditeurs. Je pense que demain, tu vas être pris d’une envie d’acheter un canard.

Déjà là, ça me démangeait, j’ai commencé avec du canard WC mais ce n’était pas pareil…
C’est ton système immunitaire qui n’est pas très performant parce que c’est plus ou moins long.

On va parler de l’album, les gens commencent déjà bien à le connaître, l’album était dispo avant sur le Net. Est-ce que vous pouvez me raconter un peu ce qui s’est passé pour que l’album soit téléchargeable avant qu’il ne soit dans les bacs, là, mi-mars ?
Alors, le bac, c’est fin juin, attention ! Oui, effectivement, il se trouve que l’album est sorti déjà depuis janvier en téléchargement en mp3 sur des plates-formes, pour être partout, mais ça a été fait de manière non consentante. Autre objectif, à part les thunes, c’était de le sortir en même temps en téléchargement et en CD. Comme ça, le gars qui ne jure que par  les mp3 le télécharge. Le fait est qu’il y a eu une espèce de « big mac » un jour vers janvier : y a un pote qui avait fait une recherche comme ça et il nous dit que notre album est déjà en ligne. Il se trouve en fait que le label qui s’occupait de cette distribution uniquement digitale avait mis  notre album en vente sans nous prévenir donc on a décidé de lancer la machine et à partir de ce moment-là, l’album a été en vente en téléchargement avant que le CD ne sorte le 17 mars. Cela dit, mis à part le fait qu’on n’ait pas été au courant, ce qui est toujours un peu vexant, ça nous a été bénéfique parce qu’il y a eu un gros buzz, notamment sur Myspace. Ça a intéressé certaines personnes qui, à la base, n’auraient peut-être pas été intéressées par Ultra Vomit. Les retours ont été plutôt cool ; maintenant, faut qu’on leur envoie des calottes sur scène (des calottes en deux mots, attention). Tiens, puisque tu es de là, Lille, c’est la contrée de Gronibard : maintenant, avec cet album, on nous comparera plus, je pense. A la base, il n’y a même pas trop à comparer ! C’est juste que du bourrin marrant ; il n’y a pas beaucoup de groupes qui en font.

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C’est une jolie relecture de plein de styles de métal, vous mettez une claque à plein de  groupes sur plein de styles, un travail musical assez méchant sur ce disque.
C’est un travail de mimétisme. On s’inspire de ce qu’on écoute. L’avantage, c’est qu’on peut se permettre par exemple de ressembler à mort à Immortal parce que c’est des parodies alors qu’un groupe sérieux de black, s’ils pompent trop Immortal, on leur dira : c’est bien gentil mais ça ressemble trop à Immortal ! On a quand même cette liberté de se rapprocher à fond des groupes qu’on parodie. On n’a alors plus qu’à assimiler leur style et comme on écoute pas mal de choses, ça se fait assez facilement en fait.

Ca se passe comment la composition au sein du groupe ?
Il n’y a vraiment pas de règles. Là, sur ce disque, ça fait partie du concept. Même déjà à l’époque de Mr Patate, on s’était dit qu’il fallait faire une parodie de Motörhead parce que ça faisait longtemps que je les imitais. Ça fait au moins 3 ans mais on a mis du temps à le faire.

C’est long à composer un album comme celui-là ?
Finalement oui. A partir du moment où on s’est dit qu’on allait composer, on s’est enfermé. On avait déjà quasiment tout à part qu’il fallait finaliser les compos. Les concepts, on les avait déjà tous, il y en a qui datent de super longtemps ; même « Maïté Ravendark », on l’avait avant M. Patate par exemple, sauf qu’on a revu toutes les paroles. Quand on a une idée marrante, on la traite jusqu'à ce qu’on la concrétise. Il n’y a pas de règle. Des fois, en une semaine, c’est composé, des fois, ça prend des années. Un autre exemple, « Mechanical Chiwawa », lui, c’est l’inverse : c’est parti d’un riff qui est sorti comme ça… On le trouvait cool et à un moment, on s’est dit que ça ressemblait à Carlos. De ce constat est parti le morceau.

La musique est très importante mais il y a aussi et surtout les textes. Quand on vous compare aux TTC du métal, ça vous fait quoi ?
Moi, personnellement, le problème, c’est que je ne connais pas. Après, c’est quand même différent. Ça m’a fait sourire mais maintenant, on nous compare même à Mickael Youn ! Dans le rock métal, il n’y a pas beaucoup de monde qui fait des trucs marrants.

Justement l’écriture, ça part de quoi, il se passe quoi pour arriver à des délires comme ça ?
C’est dur à expliquer. A la base, on aime tous délirer déjà et quand on nous met ensemble, ça part dans tous les sens. Après, quand on a un concept, on se creuse un peu la tête, on essaye d’écrire des trucs sensés... Par contre, tu vois, « Darry Cowl Chamber », c’est mort parce qu’il y a déjà 2 C dedans, donc des trucs « sans C »,  c’est dur (rires). Non, mais on est là, on se met derrière une feuille et on commence à délirer tous ensemble. Ensuite, on essaye de peaufiner un peu le truc. C’est une bande de potes qui se met à délirer tous ensemble. Nous, ça marche en groupe.

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Et c’est le cousin de qui, qui a des problèmes de freins ?
Le cousin du personnage, un cousin fictif, sinon le pauvre aurait eu des problèmes ! Tout ça,  c’est une petite histoire : le concept, c’est que le gars raconte une histoire. Il est pris dans le morceau, il ne sait même pas de quoi parle l’histoire, j’avoue que moi non plus ; ce sont des mots comme ça qui vont bien ensemble. Il s’est rompu le frein en prenant son bain… Ecoute bien et tu entendras un truc du genre « dans la mousse d’un bon bain », ce sont les paroles officielles, mais tu vas voir, c’est prononcé bizarrement.

Oui, c’est pour ne pas avoir de problèmes ?
Oui, on a eu des plaintes de la société protectrice de la mousse en fait, qui trouvait ça un peu insultant donc on a décidé de prononcer un peu plus « la musse ». C’est pour des problèmes juridiques.

C’est un concept assez délire, presque anti-commercial, à part que ça marche. Vous n’avez pas peur que ça ait un côté un peu pervers par la suite ?
Non, parce qu’on n’a jamais été contre une certaine reconnaissance. Quand on n’avait pas de succès, on s’en foutait. Après, s’il arrive, ça aidera juste à avoir plus de moyens et nous, on ne peut qu’être contents de ça. Plus de moyens, ça veut dire plus de conneries encore, par exemple le clip de « Judas Prost » qui a eu à l’époque un certain succès d’estime avec zéro budget, trois bouts de carton et une caméra. Si aujourd’hui, on nous propose plus de moyens, ça va nous permettre de faire un truc encore plus délirant. On peut se permettre n’importe quoi, de dire qu’on veut plein de thunes, se la péter à fond parce qu’il faudrait être con pour ne pas voir que c’est de l’humour...

Est-ce que vous pensez que vous allez toucher un public plus large que celui qui écoute du métal à la base ?
On espère, il y a un potentiel, on reçoit des messages de mecs qui nous disent : « oui, le métal à la base, c’est pas trop mon truc mais par contre, j’ai rigolé, j’ai trouvé ça excellent ». Après, est-ce que ça va exploser en dehors du métal… Moi, je pense que le son, les parodies, ça reste quand même métal. Ça peut marcher sur certains morceaux genre « Boulangerie Pâtisserie » mais « Mountains Of Maths », par exemple, c’est plus dirigé vers un public métalleux.

Et justement, en concert, ça va être facile de recréer ces ambiances et de changer ou l’ingé-son va s’arracher les cheveux ?
Justement, c’est le gros problème mais faut qu’on arrive à faire en sorte que même si elles n’ont rien à voir, ces chansons fassent partie du même truc. Au début, sur l’album, on a failli tout bien séparer et après, on s’est dit : « bah, notre style, c’est ça, c’est de partir dans tous les sens, donc voilà ». Par contre, il y aura quand même certains morceaux qui seront, j’ai l’impression, impossibles à refaire en live, par exemple, « Cannidal Corpse », à moins d’avoir un chien. Le problème, c’est qu’on a essayé un ou deux clébards en répète mais ils ne sont pas carré. Les mecs, ils ne sont pas capables de te caser un aboiement quand il faut (rires). Par contre, vu que ce qu’on fait, ça n’existe nulle part, je ne sais pas si les gens vont s’y retrouver. Les derniers concerts qu’on a faits, avec quelques nouveaux morceaux et tout ça, j’ai ressenti que certains, ne connaissant pas les morceaux, ne comprenaient pas trop ce qui se passait. Moi, ça ne me choque plus d’enchaîner « Je ne t’ai jamais autant aimé » avec « Mountains Of Maths ».

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Votre morceau préféré de l’album ?
Si je dois mettre un morceau qui résume, je pense que pour moi, ce serait « Darry Cowl Chamber ». Moi, j’aime bien les trucs black-métal pour le décalage mais j’avoue que « Les Canards », c’est quand même un grand tube, non ? « C’était mieux là », l’outro, c’est quand même une chanson qui a une histoire ; les autres étaient à deux doigts de la laisser tomber en studio.

Quelles sont vos attentes pour la suite, à part la thune ?
Ah ! A part la thune ? Si on pouvait guérir le sida par le « billet » de l’album, ah non, c’est encore la thune... Nan, l’attente, je pense que c’est encore de continuer sur la lancée, porter le truc le plus loin possible et puis les thunes, elles arriveront avec. Ce qu’on cherche, c’est une diffusion maximale.  Là, on va peut-être passer sur Le Mouv’ : on est content, ils ont pris les trucs accessibles quand même mais notre but est de faire découvrir ça au plus grand nombre possible.

Vous vous rendez compte qu’il y a quand même un gros potentiel sur ce disque…
Moi, ce que je crois, c’est que depuis le départ, on est sur un créneau où il n’y a personne. Fatalement, vu qu’on est les seuls, c’est obligé qu’il y ait un public.

C’est marrant et ça joue bien !
Oui, enfin pas plus que d’autres groupes de métal. Le problème, c’est que beaucoup font pareil. Nous préférons écouter Carcass ou At The Gates qui sont des pionniers dans leur genre. On s’est dit que ça ne servait à rien d’arriver et de faire du brutal comme 15000 groupes. On assume le coté français ; c’est ce qui permet de se la péter ricain. De toute façon,  c’est impossible que je fasse un truc sérieux. On a quelques retours de l’étranger, des gens qui  ont trouvé ça marrant alors, à part les paroles, qu’est-ce qu’ils trouvent marrant ? Sûrement le fait que ça parte dans tous les sens. J’avoue qu’on est un peu un ovni dans le genre musical métallique.

Est-ce qu’il y a des dates qui se calent pour promouvoir l’album ?
Exact, le 31 Mai à Arlon (B) avec Aborted et le Hellfest ensuite. Il y en aura d’autres en mai / juin, une espèce de tournée qui est en train de se monter. C’est 6 milliards d’humains, l’objectif. Je pense que si chacun prend un petit album d’Ultra Vomit, ça ne va rien changer pour eux. On fera une réédition, on changera trois couleurs sur la pochette. Les gens achèteront, ils sont cons. Mépriser son public, voilà qui est très important !

En parlant du comportement des gens et du disque en général, vu que vous, c’est d’abord sorti en numérique, vous voyez comment l’avenir du disque ?
J’avoue que c’est une question pertinente. Nous, c’est foutu, on a grandi avec les disques. A moins d’un séisme de fou, c’est sûr qu’on fera un CD quand même mais ça aura moins d’impact. Moi, je suis dégoûté, il faut continuer à proposer un maximum de formats et chacun choisira, à condition que ça ne soit pas du piratage. Si un gamin veut acheter 10 € en mp3, c’est mieux que de télécharger gratos. Après, c’est une prise de conscience : si tout le monde le prend gratos, on l’aura dans l’os et on ne pourra plus faire d’albums. Ca m’arrive aussi de télécharger mais à partir du moment où j’aime l’album, je l’achète. Faut voir qu’il y a eu des prix assez prohibitifs qui n’ont pas aidé le CD : 20 € la nouveauté, c’est hard pour un gamin de 15 ans !

 
Ultra Vomit – Objectif : Thunes
Listenable Records


Myspace : http://www.myspace.com/ultravomit