36CRAZYFISTS

Ah, l’Alaska, son climat rude, ses nuits qui durent six mois, ses huskies et ses camions-chenille… Pas de quoi vraiment rêver à priori. En tout cas, un environnement propice, semble-t-il, à la création et à la rage, puisque maintenant depuis 4 albums, 36 Crazyfists a réussi à se sortir de ce trou perdu. Comme un cliché peut-être, mais c’est bien de son meilleur album que le groupe vient d’accoucher. Suffisamment punchy et catchy pour attirer toute notre attention.  

Interview à paraître également dans le METAL OBS' n°19 de mai 2008

 Entretien avec Brock Lindow (vocals) – Par Geoffrey
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C’est votre 1er album pour Ferret. Qu’est-ce qui s’est passé avec Roadrunner ?
Je remercie Roadrunner pour avoir cru en nous au départ et nous avoir signés, avoir répandu notre musique auprès des masses. Mais je pense que nous avions fait le tour du cercle avec eux parce qu’on avait l’impression d’être perdus au milieu d’une cathédrale, tu vois ? Ceci dit, ils nous ont vraiment aidés à grossir. Le truc, c’est que pour l’album précédent, ils n’ont pas tenu leurs engagements au niveau des dates de sortie aux USA et en Europe. Il fallait qu’on parte, bien que ça nous ait attristés et Ferret nous a contactés. La communication a été très bonne et ils se sont engagés à nous faire grossir encore plus aux USA mais aussi en Europe, en Grande-Bretagne…

Est-ce que ça a été facile de se remettre au boulot après un album comme Rest Inside The Flames, qui était très bon ?
Oui, bien qu’il nous ait fallu d’abord recharger les batteries après les tournées de Rest Inside The Flames, qu’on a finies sur les rotules. Mais quand on a su qu’on allait signer chez Ferret, tout le monde s’est à nouveau senti très excité. Du coup, ça nous a remis en selle à 100 % pour écrire le nouvel album.

Il n’y avait pas trop de pression ? Parce que les gens ont été habitués à avoir de la qualité avec vos trois albums précédents…
Non, on ne pense pas comme ça quand on crée un nouvel album. Nous n’avons pas passés tant de temps que ça à écrire cet album et à le sortir. Non, les choses se sont vraiment bien passées quand nous avons recommencé à jouer.

On va parler de l’album mais tu n’en as pas marre qu’à chaque fois qu’on parle du groupe, on fasse obligatoirement référence au fait que vous veniez de l’Alaska ?
Ah ah ah… Non, ce n’est pas un problème même si nous n’y habitons plus ; c’est de là que nous venons et ce n’est pas un souci d’en parler.

On dirait que c’est très étrange que des mecs qui viennent de l’Alaska jouent du Metal…
Non, non ! Tout le monde ici est derrière Metallica, Slayer, Testament ou Megadeth parce qu’ils sont déjà venus ici jouer. Quand j’étais au lycée, le thrash était très populaire. Non, en fait, en Alaska, le Metal est vraiment apprécié !

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Une question plus sérieuse. Est-ce que l’Alaska a eu une influence sur votre musique, comme l’Iowa a pu en avoir sur Slipknot par exemple ?
Comme le fait qu’on soit dans le noir pendant 6 mois, c’est ça (rires) ? C’est sûr que ça a eu une influence. Les paysages y sont magnifiques, c’est très tranquille, il y a des couleurs dans le ciel que je sûr tu n’as jamais vues, l’air est cristallin et tout m’a beaucoup inspiré. La sensation d’isolation te pousse aussi à savoir qui tu es vraiment en tant que personne, ce que tu veux faire de ta vie.

Et c’est vraiment plein de vampires comme dans le film « 30 Days of Night » ?
(Et là, on entend d’autres personnes éclater de rire derrière ! - ndlr). Ah ah ah ! Non, ce n’est pas si effrayant !

Quelle fut l’idée quand vous avez commencé à écrire le nouveau matériel ?
Déjà, nous ne nous sommes jamais trop fixés de but à atteindre dans ce groupe. Nous sommes plus du genre à entrer dans une pièce, à brancher nos trucs et à jouer. Je dirais même que pour la première fois dans l’histoire du groupe, nous nous sommes sentis vraiment libres de composer comme nous l’entendions. Je me souviens bien des gars de Roadrunner qui nous disaient : « les gars, il nous faut un nouveau truc qui tue, qui va déchirer » ! Bon, c’était plus dit sur le ton de la plaisanterie mais nous n’avons jamais écrit de titres pour en faire devenir des singles ou des choses comme ça ! Là, personne ne nous a demandé d’envoyer des démos de nos titres avant, de travailler sur des photos, et cette liberté nous a permis d’être plus créatifs, je pense. Nous voulions juste écrire les meilleurs titres possibles, les plus groovy, les plus mélodiques mais sans oublier un gros côté heavy. Le groupe a vraiment poussé les choses au maximum sur ce disque.

Le son est aussi très bon sur cet album. Comment s’est passé l’enregistrement cette fois ?
Très bien ! Notre guitariste, Steve Holt, qui a produit nos deux derniers albums, s’est aussi chargé de celui-là. Il maîtrise vraiment le truc maintenant et je suis content pour lui parce que je l’ai vu commencer ce boulot en enregistrant des démos pourries quand il avait 18 ans et maintenant, les gens lui font réellement confiance. Du coup, l’ambiance était très relax et on s’est bien marré. C’était vraiment cool. (Andy Sneap a terminé le boulot en mixant l’album chez lui en Angleterre et ça sonne d’enfer… - ndlr)

Il y a aussi beaucoup d’invités sur cet album. Tu peux nous en parler ?
Nous avons toujours eu des invités sur nos disques. Cette fois-ci, nous en avons quatre. Il y a Candace de Wall Of Jericho, Adam Jackson (ex-Twelve Tribes), Gus Nicklos (The Mediam)  et Erin Knight, une chanteuse de country originaire du Canada. Ce ne sont pas des invités du style « projet à gros budget », juste des amis proches. Le tout fait tranquillement en studio, dans une atmosphère détendue.

Une question un peu plus ennuyeuse maintenant, mais peut-on parler des paroles de ce nouveau disque ?
J’ai essayé de faire ressortir mes sentiments les plus profonds. Comme de devoir rester positif alors que les choses autour de nous sont le plus souvent négatives. Des choses comme l’influence des médias ou le simple fait de sortir de chez soi et de voir toutes ces personnes autour de nous lutter pour survivre. Pointer les travers de notre société, tout en essayant de montrer aussi toutes les beautés qu’il reste. Depuis des années, j’essaie de trouver des thèmes qui parlent aux gens, pour rester connecté avec eux.

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Plus de textes politiques ?
Oui, je l’ai fait un peu plus dans le passé. Mais je ne suis pas là pour dire aux gens de haïr ceci ou cela. Il y a un morceau dans l’album qui est une lettre d’un soldat en Irak qui écrit à sa femme. Mais c’est plus pour traiter de la séparation d’un être cher qu’autre chose. Moi, quand je suis en tournée, je suis séparé de ma femme. Mais être séparé de la personne que tu aimes parce que tu es en train de servir ton pays, pour parfois pour des raisons que tu ne comprends pas et qu’en plus, tu n’as pas le choix, là, ça doit être difficile.

Bon, et dans quelques mois, tu auras un nouveau président… Attends-tu de grands changements pour le pays ?
Oui, complètement. On s’est enfermé dans un cercle vicieux, et il faut vraiment un grand changement pour nous remettre sur le droit chemin. Je ne veux plus de quelqu’un qui ne voit les relations avec les autres pays qu’à travers la guerre.

Revenons à la musique. Qu’est-ce qui a changé selon toi dans la scène metal depuis les débuts du groupe ?
Quand nous avons commencé, il n’y avait pas beaucoup de groupes qui mélangeaient les hurlements et les voix plus mélodiques dans leurs morceaux, alors que j’ai l’impression qu’il y a des tonnes de groupes qui le font maintenant. Attention, je ne dis pas que j’ai créé ce style (rire), disons qu’il n’y en avait pas beaucoup.  Mais pour le metal en général, je trouve que le style est devenu plus mainstream. Maintenant, on peut entendre du Slipknot à la radio. Quand j’étais au lycée, on n’entendait pas de groupes comme Metallica ou Pantera à la radio. Je pense que les radios « grand public » américaines ont définitivement adopté le metal dans leur programmation. Et ça, c’est une des grosses différences entre notre premier disque et maintenant.

Et vois-tu une grosse différence entre les Etats-Unis et l’Europe ?
Je ne sais pas s’il y a une grosse différence. Tout ce que je sais, c’est que les fans européens sont juste... meilleurs (rire). Mais je ne sais pas pourquoi (rire). Attention, je ne dis pas que nos fans américains sont moins bien car ils nous ont soutenus depuis le début. Mais je ne sais pas ce qu’il y a avec l’Europe, les fans y sont plus dévoués. Ils sont capables de se pointer à un show des heures avant l’ouverture des portes pour être au premier rang. Cela n’arrive jamais chez nous. Chez vous, les fans sont tellement passionnés, ils feraient tout juste pour discuter avec nous ou simplement nous serrer la main. Et puis, chez nous, les médias dictent ce qui est populaire ou pas. Chez vous, les gens vont chercher l’information, et se moquent de savoir si vous êtes underground ou pas.

Et la France dans tout ça ? A part le vin et les filles ?
Ah ah ah ah ! Ça a toujours été incroyable. Bien sûr, ça peut sonner fayot, mais je regrette vraiment que nous n’ayons joué que 3 ou 4 fois chez vous.


 
36 CRAZYFISTS – The Tide And The Takers
Ferret Music


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