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Watershed, le nouvel album d’OPETH, divise pas mal ses fans quand pour nous, il fait assez l’unanimité. Innovant, il l’est certainement, plus aérien et progressif aussi. Mikael Åkerfeldt, son mentor, nous explique ce nouveau cap pris par le groupe, issu d’une réelle envie d’en découdre et de démontrer au monde qu’Opeth est vraiment un groupe sur lequel il faut encore compter... 

Interview à paraître également dans le METAL OBS' n°20 de juin 2008

 Entretien avec Mikael Åkerfeldt et Fredrik Åkesson - Par Pierre-Antoine et Geoffrey
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Après toutes ces années, un nouvel album d’Opeth est un évènement. Réalises-tu cette attente de la part des fans ?

Mikael Åkerfeldt : Pas vraiment. Je ne me vois pas comme quelqu’un d’important que des gens veulent à tout prix écouter. J’adore juste écouter et jouer de la musique, c’est à peu près tout. Si nous avons maintenant beaucoup de monde qui aime nous écouter, c’est tant mieux et on les remercie grandement car on leur doit énormément.

Revenons un peu, si tu le veux bien, sur votre album live basé uniquement sur de vieux titres. Etait-ce un moyen de clore le chapitre d’Opeth avec Peter Lindgren ?
Un peu, c’est vrai. La setlist était juste celle que nous voulions faire sur la tournée. C’était une soirée normale. Je ne vois pas cet album comme la fin d’une ère mais vraiment comme un très bon live selon les standards habituels.

Qu’en est-il de la version DVD ?
Ca sortira en septembre normalement.

Peux-tu nous expliquer le titre de votre nouvel album, Watershed ?
Watershed est un peu venu comme ça. C’est d’ailleurs notre meilleur titre d’album à ce jour car il est très direct. Il n’y avait pas de limites à ce qu’on voulait écrire et faire et j’ai donc posé sur papier tous les mots qui semblaient le mieux d’écrire l’album et les paroles.

Il doit quand même y avoir un lien avec la pochette, et l’homme qui écrit une lettre assis à son bureau...?
Oui tout à fait. Le titre de l’album et la signification de la pochette sont liés, ainsi qu’avec les paroles mais ce sont des explications que je garderais pour moi car elles sont bien plus personnelles que d’habitude mais le thème principal est axé autour de l’isolation la plus complète.  Quand tu verras le package complet de l’album (NDLR : magnifique édition limitée, il est vrai..), tu verras ce que je veux dire et tu comprendras l’idée globale. La pochette est juste un élément de ce concept très noir. Elle suit bien les anciennes pochettes également.

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Comment s’est passé l’enregistrement ? Correctement comme pour Ghost Reveries ou avez-vous connu un enfer comme pour Deliverance et Damnation ?
Ghost Reveries s’est bien passé, oui, mais ce n’était pas byzance. Toutefois, Watershed représente la meilleure expérience studio que j’ai pu avoir. Nous avons travaillé sur deux studios en même temps, au Fascination Street. Nous avons bien pu séparer les choses, c’était excellent. Nous étions très disciplinés aussi, ce qui est assez rare. Je n’ai aussi pas pu tout contrôler, en raison de cette séparation sur deux studios, ce qui était aussi bien mieux. De toute façon, j’ai une pleine confiance dans le groupe donc je savais qu’ils feraient ce qu’ils devaient faire de la meilleure manière possible. C’était sain pour eux comme pour moi. Nous avions beaucoup répété également... Je pouvais en plus rentrer chez moi auprès des miens le week-end... Parfait !

Vous avez vraiment repoussé les limites avec ce nouvel album et tenté de nombreuses nouvelles choses. Brièvement, les blast beats sur « The Lotus Eater », une voix de femme sur « Coil » et des riffs assez Doom sur « Heir Apparent » et « Porcelain Heart »... Il était temps pour vous d’innover ?
Je ressens toujours le fait qu’il faille innover mais il est vrai que nous étions arrivés au bout d’une certaine manière de composer et le nouveau line-up a contribué un peu à ça. Les gens attendaient de nous que l’on fasse vraiment un bon CD. J’ai vécu Watershed comme une revanche pour montrer à tout le monde ce qu’on était capable de faire. C’était très excitant et motivant. Je voulais que cet album soit passionnant. Je voulais aussi que les musiciens ressentent cet album comme un challenge au moment d’apprendre les morceaux et de les enregistrer. En ce sens, il est vrai que cet album repousse nos limites.

Et cette fois, ce sont les 60’s qui ont inspiré ton travail sur cet album et non plus les 70’s ?
Oui. Tout le monde sait que les 70’s sont une grande influence pour Opeth mais beaucoup de groupes des 60’s ont eu aussi un gros impact sur moi, les Beatles par exemple. Nos influences sont une combinaison de ces deux époques. Avant de faire cet album, j’ai écouté pas mal de disques des 60’s, surtout ceux de la période psychédélique.

C’est peut-être pour ça alors qu’il y a plus de claviers sur cet album ?
Oui, notamment le melotron, qui est vraiment un instrument qui a été beaucoup utilisé dans les 60’s… 

Et comment s’est passé le travail avec les nouveaux membres ?
Ça a été une grande expérience ! Nous avons répété pendant 5 semaines à peu près et pour moi, bosser sur la composition avec Fredrik a été intéressant parce que si j’avais besoin d’un solo, il me suffisait de le lui demander ! Un des titres que nous avons écrits ensemble paraîtra d’ailleurs sur l’édition spéciale du CD. Il n’y a pas eu de problème non plus avec les autres parce que chacun sait ce qu’il a à faire et on avait tous le même but bien précis à atteindre.

Tu n’étais pas anxieux avant de composer l’album avec eux ?
Non, je ne pense pas. Il n’y a pas eu de pression particulière. Comment dire ? Ces mecs sont des vrais musiciens, ils savent ce qu’ils doivent faire de leur vie ; il y avait donc de bonnes vibrations. J’étais plus anxieux par rapport au fait de réussir à sortir des riffs qui allaient me plaire d’abord et les exciter après. Au début de la composition, j’ai vraiment écrit de la merde mais petit à petit, ça s’est mis en place. J’ai par exemple besoin d’avoir en tête les parties de claviers pour pouvoir continuer à écrire les riffs ; là, ça devient plus facile pour moi.

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Là, en mai, vous tournez avec Dream Theater. Je pense que tu as trouvé la meilleure personne pour discuter de la manière dont on écrit un album !
Yeah ! En fait, on n’a jamais parlé ensemble, avec Portnoy, de bosser ensemble. C’est plus avec Steven que j’ai discuté mais là, il me dit : « il faudra bien un batteur ! J’en parlerai à Mike. ». Mais pour l’instant, c’est plus au stade de projet : je ne veux pas qu’on présente ça comme un super groupe de stars, mais beaucoup plus comme une entité musicale à part entière.

Quand tu regardes en arrière, comment tu vois ta carrière ?
Les 10 premières années ont été parfois difficiles parce que nous n’étions pas assez reconnus, je pense. On a fait de très bons albums mais nous n’avons pas tourné beaucoup et tout d’un coup, tout est venu. Je regrette aussi que notre label ne nous ait pas soutenus plus que ça au début. C’était une bonne époque tout de même, on était insouciants mais pour ma part, je savais ce que je voulais et ce que je voulais, c’était aller de l’avant et faire d’Opeth un groupe viable.

Vous sentez la différence avec Roadrunner ?
Oui tout à fait, ils font vraiment un gros travail de promotion du groupe. Nous n’avions pas encore de partenariat de ce niveau avec un label.

Y a-t-il encore des buts que tu souhaites atteindre avec le groupe ?
Je n’ai jamais vraiment eu de but particulier à part celui de faire de la musique. Je n’avais pas envie de faire tel type d’album, tel type de musique, tel genre de tournée, je l’ai vraiment pris au jour le jour. Je ne sais pas prévoir et organiser les choses, les albums, le futur. Tout vient de la manière dont ça doit venir...

Avec l’expérience, ressens-tu encore du stress avant la sortie d’un album ?
Non, pas du tout. J’espère bien sûr que les gens vont l’aimer mais c’est tout. Je n’ai pas envie de traîner sur Internet et lire que c’est de la merde (rires).

Une petite dernière pour toi avant de passer à Fredrik, que peux-tu nous dire du futur de Bloodbath ?
Pas grand chose, il faudra demander aux autres... Mais il y aura un nouvel album. J’adore le EP qu’ils ont fait et je suis sûr que certains concerts seront donnés cet été mais franchement, je ne peux t’en dire plus... Merci à vous en tout cas pour cette interview ! Je vous passe Fredrik…

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Alors Fredrik, maintenant, que peux-tu nous dire de ton expérience avec le groupe jusque là ?
Fredrik : C’est juste tout simplement excellent, ils m’ont vraiment très bien accueilli. Je sens vraiment que je fais partie du groupe, de la composition. C’est une expérience très enrichissante et en plus, je fais partie d’un de mes groupes favoris, donc que demander de plus ?

C’est beaucoup de pression sur tes épaules ?
Oui bien sûr, entrer dans un groupe comme Opeth demande de l’investissement. Je me suis pour autant donné à fond dans l’enregistrement des chansons et j’espère que les fans vont apprécier mon travail, ça me stresse un peu. Il y a quelque mois, on a donné un concert en Suède où j’ai rencontré des die-hard fans et j’ai été super accueilli, donc ça m’a fait chaud au cœur.

Comment décrirais-tu ton travail sur ce nouvel album ?
Moins que Mikael, c’est sûr mais j’avais mon boulot à faire et j’ai fait de mon mieux pour y arriver. Je me suis vraiment donné à fond. C’est dur pour moi de définir mon travail, j’ai déjà du mal à me définir moi-même...(rires)

Parlons de « Porcelain Heart » que tu as co-écrit avec Mikael…
Oui. J’ai écrit le riff Doom du début et sincèrement, je ne pensais pas qu’il aimerait. Je l’ai joué comme ça un jour et il a dit : “C’est quoi, ça ??? “. On a donc commencé à bosser dessus, faire évoluer la chanson et aujourd’hui, tu entends ce que ça a donné. Mikael a beaucoup arrangé la chanson mais je suis très fier d’y avoir participé.

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Participeras-tu à plus de création dans le futur ?
Bien sûr, pour le prochain, je vais tout faire pour écrire le plus de parties possible. C’est Mikael qui décidera si c’est bon ou non pour Opeth et si c’est le cas je serai heureux, ça me fera me sentir encore plus un membre du groupe. Mikael sera toujours le compositeur principal d’Opeth, je ne changerai pas ça mais je participerai du mieux que je le pourrai. On verra ce qu’il adviendra...

Comment te sens-tu à la veille de la sortie de Watershed ?
Excité. Jusque là, les journalistes me félicitent donc c’est un bon début. On verra ensuite lors de la tournée ce que les fans nous diront.

Tu penses qu’ils seront surpris ?
Un peu, je pense. La musique d’Opeth a évolué avec cet album. Cet album prend une nouvelle direction, il est plus expérimental. D’un côté, il a les parties les plus brutales jamais composées par le groupe et d’un autre côté, les plus mélodieuses.

Ils  seront surpris d’entendre pour commencer « Coil ». Plutôt calme comme début d’album ?
Oui, c’est sûr (rires). On a trouvé ça très fort de commencer par ça. J’adorerais voir la tête des gens dans les magasins qui ne connaissent pas le groupe et qui vont découvrir en se disant que c’est plutôt joli et ensuite, quelle baffe ils vont prendre...(rires). Pour moi, c’est vraiment une intro. Je ne pense pas que les gens vont se dire que parce que nous utilisons une voix féminine, ça fait commercial. C’est plus une atmosphère. Le contraste entre les deux premières chansons est excellent. Beaucoup de groupes pensent qu’il faut commencer avec le morceau le plus bourrin de l’album mais Opeth ne suit pas les modes, donc nous n’avons pas fait pareil.

Penses-tu comme nous qu’il faut vraiment plusieurs écoutes avant de rentrer dans l’album ?
Tout à fait. Mais c‘est comme ça avec Opeth depuis le début. Il faut faire un effort pour rentrer dans un album mais au moins on ne se lasse jamais d’un album d’Opeth !


 
OPETH – Watershed
Roadrunner Records


Site : www.opeth.com

Myspace : www.myspace.com/opeth