LYZANXIA

Crimes et châtiments...



S’il y a bien un groupe français dont on pense ici qu’il mériterait d’être plus apprécié et reconnu, c’est bien celui des Angevins, qui n’ont fait que sortir de bons albums depuis leur formation. Locust, 4ème du nom, ne déroge pas du tout à cette règle, le groupe montrant un visage encore plus sombre et mature. Mais est-il aussi facile que ça de jouer du Metal en France, un pays où la concurrence se fait un peu plus rude chaque année ? Nous avons cuisiné un des deux frangins Potvin pour en savoir un peu plus…

Interview parue également dans le Metal Obs' 40 de mai 2010

Entretien avec Frank Potvin (guitares) – Par Geoffrey & Will Of Death
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Déjà, félicitations, vous sortez certainement votre meilleur album à ce jour… Mais peux-tu nous expliquer pourquoi le nom de Lyzanxia ne perce toujours pas ? C’est la faute à pas de chance ou vous êtes des fainéants ?
On a la reconnaissance d’un noyau de fans assez sérieux qui nous suivent réellement. Notre vraie réussite n’est pas commerciale mais plutôt personnelle : en effet, quand on reçoit l’album terminé, avec la pochette, le son, etc, là on est contents ! Maintenant, on est en France, et même si le Hellfest fait beaucoup parler de lui en ce moment, tu n’entendras jamais du Korn ou du Deftones sur les mass medias… Les Allemands, Suédois, Anglais ou encore Américains considèrent le Metal comme étant une musique comme les autres et on ne doit pas la dénigrer. En France, on est soutenus par des magazines spécialisés comme le vôtre, mais quand on envoie notre CD à des grosses radios qui diffusent des pseudo-émissions de Rock ou de Metal, on nous dit qu’on est cinglés, que notre musique est trop violente pour être passée ! Les seules émissions de Metal à la TV passent à 1h du matin, une heure où les jeunes de 14 / 15 ans dorment car ils vont en cours le lendemain ; c’est dommage.

Et quand tu lis les commentaires du patron de Season Of Mist, qui a déclaré récemment qu’il ne souhaitait plus booster les jeunes groupes français car ils ne sont pas rentables, tu le prends comment ?
Le problème d’un label comme Season Of Mist est qu’ils sont aussi distributeurs et sortent 20 à 25 disques par jour, et au bout d’un moment, tu ne sais plus lequel choisir ! Il y a une pression du distributeur énorme, ils inondent le marché, et sur 25 disques commandés, seuls peut-être 18 sont achetés. Je ne vois pas pourquoi ils ont poussé plus Marduk que Dagoba, qui étaient chez eux sur l’album d’avant. Dagoba, on aime ou on n’aime pas, mais si Season avait fait le boulot, ils auraient pu en vendre beaucoup plus… Quand tu vas à l’étranger, les groupes français font vraiment parler d’eux et ce n’est pas uniquement à cause du succès de Gojira. On a tout un tas de bons groupes qui ont une production énorme, des titres fabuleux qui ont déjà commencé à signer à l’étranger et des fois, on passe pour des cons pour ça. La scène suédoise ne s’est pas faite en un an et c’est ce qu’on est en train de faire en France : le niveau est aujourd’hui très élevé et il nous faut un réel soutien. Tu le vois bien : dès que tu mets une news quelque part, tu te fais descendre par des mecs qui passent leur journée derrière leur ordinateur ; c’est ce qui me fait dire que le public français soutient ses groupes mais pas encore assez.

De toute façon, tu l’as expérimenté avec One-Way Mirror en signant chez Metal Blade. Tu as senti une grosse différence ?
Oui, très clairement. Metal Blade est une grosse machine mais qui est restée indépendante, avec de vrais passionnés. Quand tu les appelles au téléphone et que tu veux parler à un gars en particulier, tu peux ! Les rapports sont sains. Le boss est capable de répondre à toutes tes questions et il est à ton écoute. Ils espéraient qu’on fasse mieux mais c’est grâce à Metal Blade qu’on a pu rentrer sur la tournée Soilwork.

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Et pourquoi XIII Bis et pas Metal Blade, pour le nouveau Lyzanxia ?
On a envoyé l’album à Metal Blade un peu par obligation car ils voulaient vérifier qu’il n’y avait pas trop de choses identiques entre Lyzanxie et One-Way… et ils auraient pu nous signer s’ils n’avaient pas déjà One-Way Mirror. Ils devaient faire un choix. Nous, on ne voulait pas forcément signer avec eux non plus sinon, ils nous auraient mis une pression d’enfer. Alors, Locust est le 4ème album de Lyzanxia et ça va nous faire quasiment un 4ème label : XIII Bis nous a fait une bonne proposition, ils ont des bons groupes français (Dagoba, Loudblast, L’Esprit Du Clan…) et ça nous plaisait bien d’avoir un interlocuteur français. Comme lors des premières discussions, on a senti qu’ils étaient motivés, on a signé là-bas.

Et quand a été composé le nouveau Lyzanxia ?
Il a été composé avant qu’on ne parte en tournée avec One-Way Mirror, qui n’a pas du tout influencé Lyzanxia. Il faut que les gens en soient bien conscients. Pendant longtemps, jusque Unsu, ça a été mon frangin qui composait presque tout et je supervisais mais depuis, Vins Perdicaro (basse) s’est beaucoup plus impliqué et je suis capable aujourd’hui de pondre un morceau en une heure avec Vincent (drums) et Perdi, sans forcément que mon frère soit là. C’est d’ailleurs pour ça que je pense que cet album sonne vraiment varié car un réel échange s’est créé.

Comment tu vois l’album précédent sorti en 2006, Unsu ?
Je le vois très brut. J’ai l’impression qu’il y a une espèce de rage, une envie de tout casser alors que ce n’était pas forcément notre état d’esprit à l’époque. Il me paraît plus violent que Locust, alors que pour certaines personnes, c’est le contraire…

Oui, justement, c’est notre cas (rires).
Ben voilà ! Les musiciens ont beaucoup de mal à prendre du recul en général. Je pense quand même que Locust est plus sombre, plus mature. On savait exactement ce qu’on voulait dès l’enregistrement de la 1ère démo et c’est aussi pour ça qu’on a produit l’album nous-mêmes. Maintenant que j’écoute l’album masterisé, je trouve qu’on est vachement proches de la vérité et qu’on a vu juste au niveau des arrangements. Ça fait plaisir… Pour la petite histoire, on a rencontré Fredrik Nordström sur la date de Göteborg quand on tournait avec Soilwork pour One-Way Mirror et il a écouté les démos. On lui a dit qu’on allait faire « comme ci et comme ça », et il nous a alors répondu qu’on devrait enregistrer l’album nous-mêmes. Ce n’était pas pour nous vanner ou nous envoyer chier, il était sincère et en plus, il nous a dit que ça nous coûterait vachement moins de thunes (rires) ! On avait déjà enregistré Phase 1 nous-mêmes, un de nos autres projets, ainsi que quelques démos. On produit aussi d’autres groupes dans notre studio ; on se sentait capables d’avoir assez de recul pour nous enregistrer nous-mêmes… Notre studio, c’est aussi ce qui nous permet de vivre et donc, comme on a travaillé sur plein de trucs, on a acquis assez d’expérience. En plus, ça ne nous a pas mis plus de pression car on avait le temps.

Locust, ça veut dire quoi ?
En fait, c’est une position du kama-sutra ! Tu ne le savais pas ? …. non, c’est pas vrai (rires) ! C’est un terme anglophone un peu générique pour décrire les sauterelles ou les grillons. Il y a une référence biblique je crois, un truc comme quoi un jour les locusts prendront le pouvoir et recouvriront la Terre entière, une sorte de châtiment. On s’est inspiré d’un livre qu’on a lu, et qui a d’ailleurs servi aux textes du dernier morceau de l’album, « Father Râ ». On trouvait que ce mot sonnait bien et qu’il représentait bien notre artwork…

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C’est un concept album ?
Non, il n’y a pas vraiment de lien entre tout ça. On a fait comme d’hab’ : chaque titre raconte une histoire inspirée de nos rêves, de nos vies ou des films qu’on a regardés. C’est un exercice intéressant.

Au fil des années, l’inspiration vient toujours aussi facilement ?
Oui, parce qu’on aime toujours ce qu’on fait. On se lève le matin, à 14 heures (rires), on prend nos guitares et on se fend la gueule à jouer ensemble. L’inspiration vient quand on a l’esprit complètement libre.  

Quelles sont vos envies, là ?
L’album sort trop tard pour qu’on fasse les festivals d’été mais comme on a désormais un management hyper actif, localisé en Suisse, très pro, on va tourner au maximum. On va aussi faire un clip-vidéo et on va donc défendre cet album à mort, bien plus que les autres. On bosse là-dessus pour septembre / octobre. Parfois, on se dit que ça aurait été plus simple pour nous si nous étions apparus en Angleterre ou aux USA, mais c’est comme ça. Mais dans ces pays, il y a tellement de bons groupes que le risque est d’être noyé dans la masse. Nous, on n’est pas mécontents d’être en France ; on est dans une bonne période pour la musique Rock. Il y a quelques années, on ne te parlait que de Rap, mais là, le Rock revient sur le devant de la scène… L’autre jour, je suis allé voir Prodigy à Nantes et c’était blindé de Rockers et de Métalleux. Quand tu vois qu’un mec comme Pascal Obispo est obligé d’annuler sa tournée parce qu’il ne vend pas assez de tickets, moi, ça me fait complètement plaisir (rires) ! C’est vache, mais faut le dire : ce mec-là, il fait de la merde !

L’autre jour, je discutais avec les mecs de Mass Hysteria ou d’Aqme, et les deux nous disaient qu’eux aussi avaient du mal à trouver des dates…
Ouais, Mass Hysteria sont là depuis longtemps et sont super cool. Sur scène, ça envoie. Après, je pense qu’ils ont énormément tourné et les programmateurs ne veulent peut-être plus trop prendre un groupe dont le public pourrait se lasser, alors que ce n’est pas le cas. L’idéal pour nous serait de faire 25 / 30 bonnes dates, avec du monde dans la salle, une entrée pas trop chère et de bonnes conditions. Il faut aller un peu partout. Nous, on habite Angers et si tu joues dans toutes les salles des alentours, il arrivera un moment où on se retrouvera devant des salles vides, les gens en auront marre…


LYZANXIA – Locust
XIII Bis / Sony



Site : www.lyzanxia.com

Myspace : www.myspace.com/lyzanxiaband