NIGHTFALL

Renaissance...


Un peu d’histoire : en 1992, Nightfall donnait naissance à son premier opus, Parade Into Centuries, qui allait alors être le premier disque de Metal grec (et de Rock au sens large) à bénéficier d’une diffusion internationale, et ce, grâce au label français Holy Records (cocorico !). Or, silence radio chez nos Grecs depuis 2005, date à laquelle le label Black Lotus  (qui a coulé entre temps) publia Lyssa / Rural Gods And Astonishing Punishments. C’est avec surprise que ressurgit aujourd’hui ce fantastique groupe athénien, unique et toujours novateur…

Interview parue également dans le Metal Obs' 42 de Sept. 2010

Entretien avec Efthimis Karadimas (Chant) – Par Seigneur Fred & Sophiecat
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On est ravi que vous soyez de retour avec ce nouvel album. Qu’avez-vous fait, toi et les autres, depuis la sortie de Lyssa / Rural Gods And Astonishing Punishments en 2005 ? On a cru que vous vous étiez séparés…
Salut à vous et merci du soutien durant toutes ces années ! Lyssa (…) n’a pas eu de chance à sa sortie parce que le label a arrêté ses activités et l’album n’a pas bénéficié du tout de promo. Par contre, ce malheureux événement m’a permis de faire un break et de me pencher sur l’existence de Nightfall, un peu comme une crise de la cinquantaine du groupe (rires). A cette époque, les autres membres étaient plus jeunes et plus motivés pour faire des albums, des tournées et toutes ces choses mais je n’avais pas plus envie de cela. Ma décision s’est avérée être la bonne. Ce break a vu naître la sortie d’Astron Black And The Thirty Tyrants, le meilleur album que Nightfall n’ait jamais fait !

Au début de l’année, Sakis Tolis des célèbres Rotting Christ m’a confirmé qu’il y avait une crise économique et sociale importante en Grèce actuellement. Quel est ton point de vue sur ce problème et comment vis-tu personnellement dans ces conditions difficiles au quotidien, en tant qu’artiste ?
L’art m’a permis d’extraire le poison de la réalité quotidienne hors de mes veines. Dans ces termes, la réalité actuelle me donne plein d’inspiration.  Au sujet de l’économie, c’est l’histoire qui a commencé en 2008 avec le crash financier mondial et qui a maintenant des effets néfastes dans les pays européens, en commençant par la Grèce, le Portugal, l’Espagne, l’Irlande et j’espère aucun autre. La Grèce a été le maillon faible à cause de mauvaises gestions financières mais aussi à cause d’énormes dépenses monétaires par rapport aux très faibles exportations. C’est arrivé quelques fois dans ce siècle et les politiciens ont utilisé la dévaluation de la monnaie pour protéger l’économie nationale, mais maintenant avec l’euro, une telle solution est impossible. Mais les choses vont évoluer et une solution va être trouvée. La grande question, c’est de savoir si l’Union Européenne va bouger en bloc ou si seul quelques pays vont bouger. Je pense que cette crise est un grand test. Par rapport à la vie sociale ici en Grèce, eh bien je pense que la situation est une bonne opportunité pour mettre fin à la blague « Zorba » (NDLR : film grec un peu loufoque) et le train de vie exubérant qu’il représente et de remettre les choses à leur place, c'est-à-dire de créer de vraies richesses, spirituelles et liées à notre civilisation.

Comment avez-vous préparé ce nouvel et huitième album nommé Astron Black And The Thirty Tyrants ?
Pendant des années, le groupe a été mis à l’ombre mais ça ne veut pas dire que je n’ai pas joué et composé de la musique moi-même. Jorg, Stathis et Evan m’ont ensuite rejoint les uns après les autres pour faire un bon enregistrement. Pas pour une sortie officielle d’abord mais surtout pour notre propre plaisir. Puis les choses se sont faites d’elles-mêmes et le nouveau matériel s’est avéré être assez solide pour nous unir comme un groupe. Metal Blade est ensuite arrivé et la conspiration des Tyrants est apparue en chair et en os (rires) !

Nous faisons de l’art, nous créons de la musique
et le silence est une part importante dans la genèse de celle-ci…

Es-tu resté en contact avec d’autres influences et mouvements Metal pendant ces cinq années de silence ? Ou bien as-tu travaillé et composé en t’isolant du monde pour retrouver le son et l’identité de Nightfall ?
Hum, des deux choix que tu me proposes, je me retrouve dans le deuxième à vrai dire. Je n’étais pas attiré par les choses produites récemment et j’ai préféré prendre du temps par moi-même et pour moi-même. Quand il est temps de remettre les choses en question, tu dois purifier ton âme. Si certains compromis sont faits, cela peut être fatal par la suite et tu dois recommencer. Les gens sentent quand quelqu’un a quelque chose à dire et si il n’a rien à dire alors c’est vraiment pathétique de le voir se dépatouiller seul pour rester sous les projecteurs alors que tout le monde en a assez d’eux. Nous ne sommes pas des machines musicales qui produisent de la musique sur commande. Nous faisons de l’art, nous créons de la musique et le silence est une part importante dans la genèse de celle-ci…

Peux-tu présenter les nouveaux membres parce qu’il y a eu beaucoup de changements de line-up en 2010 ? Qui est votre talentueux guitariste Evan Hensley ? Et Jorg Uken, qui joue dans Mandrake aussi je crois ?
Evan Hensley est bien un super guitariste américain en effet, et plus précisément de Nashville dans le Tennessee. On peut entendre son talent tout au long d’Astron Black And The Thirty Tyrants. Stathis Kassios est dans le groupe depuis la période I Am Jesus. Il jouait déjà aux claviers pour des shows de Nightfall à cette époque. Quant à Jorg Uken (Mandrake et d’autres groupes), c’est l’homme à tout faire des Soundlodge Studios (God Dethroned, Dew-Scented…), ce qui veut dire que son rôle ne se limite pas qu’à la batterie mais il s’occupe du son de Nightfall dans son ensemble. Je suis reconnaissant de jouer avec ces mecs aujourd’hui. C’est le meilleur line-up et le plus souple que Nightfall n’ait jamais eu ! Ils sont tout simplement excellents.

Ce nouvel album est très direct et mélodique mais aussi pur, organique, old school même, sans influence Dark/Gothic comme parfois dans le passé. Pour le public, cela va être facile à assimiler. Qu’en penses-tu ?
Je pense qu’Astron Black And The Thirty Tyrants peut satisfaire le cerveau et les oreilles de n’importe quel fan de Metal et pas seulement d’un genre particulier. Il possède une puissance brute old school mêlée à des tonalités épiques et de longs rythmes que toute personne ayant de bons goûts en matière de Metal appréciera. Les origines du groupe ont aussi agi comme un catalyseur. Nous avons l’attitude directe allemande dans la batterie, les guitares fluides américaines sudistes et l’esprit sardonique grec méditerranéen et tout ça mis ensemble élargit les horizons.

NIGHTFALL

En tant que passionné d’Histoire, est-ce que le nom de l’album, Astron Black And The Thirty Tyrants, fait référence à la fin de la guerre du Péloponnèse en -404 avant J-C et le règne des Trente à Athènes pendant plusieurs mois ? Peux-tu expliquer le concept de l’album ?
« The Thirty Tyrants » fait effectivement référence à cette période de notre histoire nationale. J’ai toujours utilisé les événements historiques comme des allégories dans la poésie de Nightfall. Cela part du principe que tout peut être considéré comme tyrannique quand il y en a trop : de l’amour à l’avarice, des rêves à la douleur, ceci peut facilement devenir quelque chose de tyrannique qui dicte ta vie. Concernant « Astron Black », c’est un personnage fictif qui reflète la race humaine évoluant dans le temps. Les deux parties se réfèrent à nous, les humains, qui essayons de trouver le juste milieu dans tout ce que nous faisons alors qu’en même temps on tente de surmonter nos peurs, l’inconnu, et on essaie d’avancer pour développer notre civilisation dans l’espace et le temps. Quand on dit le « temps », c’est ce mouvement harmonieux entre la terre et les astres, les corps vivants et morts qui naviguent dans cette chorégraphie universelle dans laquelle nous dansons tous.

L’artwork est magnifique, avec cette trière (navire antique grec) et la mer, mais aussi peut-être l’œil de la déesse Athéna… Qui l’a réalisé et je suppose que c’est en relation avec le nom de l’album et le concept ?
Oui, la navigation est une des techniques les plus excitantes que les humains aient inventée pour se positionner sur la terre, la mer ou l’espace. Ce mécanisme incroyable évoluant harmonieusement avec nous à travers les siècles est l’icône de base qu’on peut retenir d’Astron Black And The Thirty Tyrants. J’ai proposé l’idée avec le dessin de l’œil et de la trière athénienne à Travis Smith et il en a fait cette superbe couverture. Je suis aussi satisfait parce que cela ne ressemble à rien de ce que Travis ait pu faire auparavant, ce qui veut dire qu’il a eu une sorte d’inspiration et a poussé plus loin les limites de son art.

Chaque album de Nightfall devient en fait une pièce maitresse avec le temps dans votre riche discographie. Avec ce nouveau disque, que voulez-vous encore prouver et apporter à la scène Metal en 2010 ?
Nous sommes en ce moment dans une période très appréciable dans la carrière du groupe avec un super album qui sort après une longue période de silence. Vous allez devoir apprécier Astron Black And The Thirty Tyrants pendant quelques temps (rires) car nous ne voyons pas cette sortie comme une raison de revenir sous les projecteurs mais comme une vraie pièce de théâtre tragique dans le sens de l’art. La musique Metal n’est plus toute jeune et je pense fortement qu’il est temps de regarder cette expression musicale comme de l’art pur et pas seulement comme une façon de distraire les gens et de vendre désespérément avant de passer à l’album suivant, etc. Selon cette approche, Astron Black And The Thirty Tyrants est ce que Nightfall peut réaliser de mieux de nos jours et qui sait pour combien de temps…

Conserves-tu de bonnes relations avec Philippe et Séverine du label français Holy Records qui vous a lancés ?
J’adore Séverine et Philippe ! Notre relation a traversé tous les aspects dramatiques d’une relation avec des aspirations, une vision, et des nerfs sous tension à contrôler (rires) ! Nightfall et Holy Records ont été les pionniers d’un mouvement qui s’est avéré être fructueux pour beaucoup de groupes grecs issus de toute une scène ainsi que pour les labels français et c’est ce qui compte au final.

Pour conclure, quels sont les projets du groupe et comment vois-tu l’avenir de Nightfall ?
Le seul but est de produire des œuvres d’art intéressantes et d’interagir avec des gens intéressants qui savent ce qu’est l’art et qui l’apprécient. Merci à toi !
 

NIGHTFALL – Astron Black And The Thirty Tyrants
Metal Blade / Season Of Mist



Myspace : www.myspace.com/nightfallgr