SKALMOLD


Berceuses infernales...



Skálmöld par ci, Skálmöld par là, dès qu’on parle viking metal, le nom du groupe Islandais revient désormais sans cesse, signe que la formation scandinave est parvenue à se hisser au niveau des meilleurs du genre. La sortie du nouvel album, Vögguvísur Yggdrasils, a donc été pour nous une excellente occasion de discuter avec le batteur Jón Geir Jóhannsson, de son groupe et de leurs croyances nordiques.

Interview parue également dans le Metallian 97 de Septembre 2016
(en version éditée)


Entretien avec Jón Geir Jóhannsson (batterie) par Will Of Death
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Depuis la sortie de Með Vættum et de l’album live avec l’orchestre symphonique, on n’entend parler que de vous sur la scène viking… Comment voyez-vous aujourd’hui ces deux albums, et surtout qu’est-ce que ça a changé pour vous ?
Merci, je les aime toujours autant. Je pense que chaque album nous a fait progresser en tant que musicien et nous a rapprochés de ce que nous sommes vraiment et de ce que nous voulons. Je pense que Með Vættum est notre meilleur album à ce jour, mais ça va évidemment changer avec le nouveau (Rires !). La collaboration avec l’orchestre fut juste une expérience énorme. Être entouré par trois cents personnes jouant ta musique fut un rêve. Encore aujourd’hui, quand je regarde le DVD, j’en ai la chair de poule et j’espère qu’il en est de même pour les fans. Je ne dirais pas que ces deux albums ont changé nos vies mais il y a quand même de plus en plus de monde à nos concerts, donc c’est aussi plus amusant pour nous.

Vous sortez un nouvel album, intitulé Vögguvísur Yggdrasils. Quelle était l’idée générale derrière ce disque, en termes de paroles et de musique ?
Les trois premiers albums contenaient une histoire linéaire et nous voulions couper avec ça. Ça fait un moment que nous évoquions cette histoire de berceuses, parce qu’en fait, les berceuses Islandaises sont assez souvent sombres et effrayantes. On a donc créé une berceuse pour évoquer chacun des neuf mondes d’Yggdrasil. Chaque monde est un élément différent, comme la sécurité d’Asgard, la nature destructrice de Múspellsheim ou encore la misère de Hel, et on trouvait cool d’explorer ces thèmes. Musicalement, on n’avait pas de plan, on a juste commencé à composer et les idées sont venues d’elles-mêmes.   

Quels sont les points que vous vouliez absolument améliorer par rapport à vos albums précédents ? Avez-vous expérimenté certaines nouvelles choses, de nouvelles structures, de nouveaux instruments ?
Personnellement, je cherche juste à m’améliorer chaque fois. Si tu commences à te dire « il faut une chanson comme celle-ci, parce que tout le monde l’aime », t’es mort. On fait de notre mieux pour éviter de penser aux albums précédents quand nous écrivons. Quand nous avons fait Með Vættum, nous avons beaucoup insisté pour avoir une grosse production, avec tous ces éléments symphoniques, mais pour le nouvel album, nous voulions revenir aux bases, en étant plus sauvages. Nous avons donc travaillé avec un nouveau producteur pour Vögguvísur Yggdrasils, en la personne d’Arnar Guðjónsson, car nous savions qu’il allait nous proposer une autre direction. Cet album est tout de même assez proche de Með Vættum par certains côtés, mais je pense qu’Arnar a élargi notre spectre sonore.  

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Impossible de se rendre compte ici à quel point la mythologie nordique est encore présente dans les pays scandinaves. Certes, un festival comme le Ragnard Rock en France s’est engouffré dans la brèche, mais en Islande, par exemple, cet héritage est-il encore vraiment présent, ou est-ce du simple folklore pour groupes de viking metal, ou plus simplement du marketing ?
Même si l’Islande est devenue un pays Chrétien par une décision unilatérale en l’An 1000, les vieilles histoires et la mythologie n’ont jamais disparu. C’est présent partout. Où que tu ailles, tu trouves des connexions avec l’ancienne mythologie nordique. Un exemple tout bête, ce sont les gardes-côtes Islandais. Ils descendent tous de la même nation de pêcheurs, qui a toujours fait très attention à la sécurité maritime, et ils nomment toujours leurs bateaux avec des noms de dieux anciens. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. En tant que religion, la communauté Ásatrú est toujours très visible en Islande (NDLR : L’Ásatrú est une manifestation du « néopaganisme » germanique,  dit aussi nordique ou scandinave. Elle tire la plupart de ses enseignements des sagas islandaises viking. Cette religion vise à faire revivre les religions ethniques qui existaient avant l'arrivée des religions monothéistes). Eh bien, ces gens sont en train de construire en ce moment un nouveau temple, le premier en plus de mille ans ! Et à mon avis, ça ne fait que commencer… La mythologie est bel et bien vivante, et c’est assez fun, car les personnages mythiques sont vraiment cool, et ça aide pour écrire de belles histoires.        

Neuf titres, neuf mondes soutenus par Yggdrasil, normal… Comme on ne comprend rien à vos paroles, pouvez-vous nous éclairer sur la manière dont vous avez abordé l’écriture ? Est-ce simplement narratif, descriptif, poétique ou métaphorique ? Bref, développez-vous une sorte de philosophie derrière ?
C’est un peu tout ça  à la fois. Narratif dans le sens où les paroles s’enchaînent naturellement et racontent des histoires, descriptif parce qu’elles racontent des histoires de choses déjà établies au travers des mythes, poétique parce que ce sont des contes dramatiques et originaux, et métaphorique comme peut l’être la mythologie elle-même. Pour faire court, c’est de la fiction, mais les croyances nordiques sont partout présentes. La beauté des neuf mondes, c’est qu’ils couvrent tout le spectre des comportements humains, des manières de penser, et plus largement évoquent notre société. Nous pouvons tous trouver notre place dans le domaine d’Yggdrasil.

Vous avez quand même une idée bien à vous du concept de « berceuse »… lol… C’est vraiment avec ce genre de musique qu’on endort les enfants en Islande ?
Ah ah ah ! Oui, c’est d’ailleurs pour ça que nous sommes comme ça aujourd’hui (Rires !).

Comment expliques-tu l’ampleur qu’a pris depuis quelques années la scène viking, avec notamment des festivals dédiés, et ce dans tous les pays, même les non-scandinaves ?
Je ne sais pas. Comme je l’ai dit, les histoires et les concepts sont bien cool, et c’est marrant.

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Votre équipe de foot a réalisé un superbe parcours lors de l’Euro 2016 en France. Au-delà du simple aspect sportif, ce parcours a mis la lumière sur votre pays. Par exemple, c’est la première fois que je voyais à la TV des images du centre de Reykjavik… Quel impact cela a-t-il eu sur le pays ?
En fait, les gars n’ont fait que suivre les traces de l’équipe féminine, qui a déjà obtenu de très bons résultats par le passé, mais sans attirer autant la lumière. Évidemment, quand une équipe issue d’un petit pays de trois cent trente mille âmes bat des gros, les gens trouvent ça cool, mais le point négatif est ce putain de chant repris partout, qui n’a rien d’Islandais. Cette chanson a été piquée au départ par les supporters des équipes de première division Islandaise à Motherwell, une équipe Ecossaise. Finalement, l’équipe nationale se l’est appropriée. C’était marrant au début mais quand tu vois que ces glands de Mumford And Sons (NDLR : un groupe de pop anglaise) s’y mettent aussi, assez, c’est assez !    

L’Islande est devenue un peu le pays Européen à la mode en ce moment pour le tourisme, avec toutes les nuisances que ça peut engendrer. Comment vois-tu la question ?
Bien sûr, il y a du pour et du contre. J’habite Reykjavik et ça n’a jamais été aussi vivant, mais je remarque quand même que de plus en plus de maisons sont transformées en hôtels ou louées via AirBnB. Il ne faudrait quand même pas que l’endroit perde de son charme, comme on peut le voir partout où le tourisme est devenu roi. C’est une question d’équilibre et de respect pour ce qui vous entoure quand vous venez chez nous. Même chose avec la nature. Si l’équilibre n’est pas rompu, ça me va.

Ces deux dernières années, vous êtes venus jouer en France à plusieurs reprises, notamment au Ragnard Rock Fest #1, lors de la Nox Inferna dans un monastère ou encore au Hellfest… Comment avez-vous été accueillis ?
J’adore jouer en France, c’est vraiment un de mes endroits préférés. Le public nous a toujours bien accueillis et ça ne fait que s’améliorer. On donne à chaque fois tout ce qu’on a, et vous nous le rendez bien.

Vous allez partir en tournée avec Korpiklaani et Moonsorrow à travers l’Europe cet automne. Qu’attendez-vous de ces shows ?
On attend surtout de se marrer (comme toujours quand on voyage avec des Finlandais) et de boire beaucoup (comme toujours quand on voyage avec des Finlandais) (Rires !). Par contre, j’ai vu qu’il n’y avait pas de concerts prévus en France sur cette tournée, fait chier ! Mais nul doute qu’on reviendra bientôt ! Merci à vous !
 

SKÁLMÖLD – Vögguvísur Yggdrasils
Napalm Records


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