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Le rouge et le noir...




Plus de dix ans que les Nordistes n'avaient pas sorti d'album de S.U.P ! Jamais il n'y avait eu un tel délai entre deux albums. Certes, les gars ne sont pas restés inactifs pour autant, mettant l'accent sur la version death metal du groupe, Supuration, et c'est donc avec plaisir que nous avons reçu cet excellent nouvel album et que nous avons contacté les deux frangins Loez pour en savoir un peu plus.


Interview parue également dans le Metallian 112 de Mars 2019
(entière ici)


Entretien avec Fabrice et Ludovic Loez (guitares, chant)... Par Will Of Death
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Mine de rien, Hegemony date de 2008, alors que les précédents albums étaient sortis à deux ou trois ans d'intervalle maximum. Pourquoi vous a-t-il fallu autant de temps pour vous replonger dans cette version de votre groupe ?
Fabrice : Salut Will, content de répondre à tes questions. Effectivement, depuis 2008, S.U.P a été mis de côté au profit de pas mal de choses, surtout Supuration qui nous a pris énormément de temps et d'énergie. Nous avons sorti deux albums de Supuration (CU3E et Reveries). Ensuite, nous avons participé à pas mal de petits projets avec Metaluna Productions (des courts et longs métrages). Nous ne pouvons pas mélanger les deux entités S.U.P et Supuration. Cela dit, un titre avait commencé à voir le jour début 2009, il est sur le nouvel album de S.U.P ("Dissymmetry").
Ludovic : Dans un premier temps, nous cherchions un label pour terminer la trilogie de The Cube, la réalisation de ce projet a été relativement longue. Ce n'est pas la composition ou l'enregistrement qui prennent du temps mais tous les à-côtés, comme certaines divergences artistiques avec le label, ce qui ralentit le processus par exemple, et comme nous avions une demande de vinyls, nous avons dû nous débrouiller pour trouver les fonds nécessaires nous-mêmes.

Y a-t-il un thème récurrent, un concept, pour cet album, comme ce fut le cas pour les précédents, ou même ceux de Supuration ?
Fabrice : Oui, c'est toujours le cas, nous faisons des albums avec une histoire, comme à notre habitude. Ce moyen de communication me paraît plus efficace, il fait beaucoup plus réfléchir, nous ne pouvons pas bâcler une histoire. C'est beaucoup plus motivant. On ne s'en lasse pas.
Ludovic : Les thèmes récurrents dans nos concept albums sont le fantastique et la science-fiction.  Pour le nouvel album, nous sommes plutôt dans la science-fiction.
 
Par rapport aux précédents albums, j'ai la sensation qu'il n'y a jamais eu autant de voix death sur un album de S.U.P. Déjà, es-tu d'accord, et cela serait-il dû à la dureté de certains thèmes ou à une certaine forme de colère ?
Fabrice : C'est certainement le cas, Ludo s'est lâché là-dessus. Il y a beaucoup de textes également. Le fait qu'il y ait beaucoup de growls donne encore plus d'impact au chant clair.
Le thème, c'est la schizophrénie d'un homme, d'un savant qui entreprend une expérience très personnelle sur lui-même pour se guérir. C'est très sanglant, c'est une sorte de conte gore comme dirait Ludo. Cet homme a une colère intérieure très forte, ce qui peut correspondre à tous ces growls.
Ludovic : Certains de nos albums nécessitent plus ou moins de chants gutturaux ou de chants clairs, cela dépend évidemment de l'histoire que nous abordons. On pourrait chronométrer sur tous les albums de S.U.P le pourcentage chants clairs /growls. Je pense que nous ne sommes pas loin des cinquante-cinquante.
 
Vous mettez-vous dans un certain état d'esprit, quand vous composez un album de S.U.P, par rapport à Supuration ?
Fabrice : Je dirais que c'est l'inverse. C'est plutôt le climat qui nous entoure qui influe sur les compositions et l'écriture. L'état d'esprit de Ludo, au moment où il écrit, est très déterminant sur ses compositions.
Ludovic : Nous sommes plus libres dans l'écriture d'un album de S.U.P, moins bridés par rapport à Supuration. Une fois l'histoire écrite, la musique vient d'elle-même... Elle devient même évidente.

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Les mecs, je dois dire que vous êtes surprenants, car vous parviendrez presque à faire aimer la new wave à un vieux metalleux comme moi, avec un titre comme "Excision". Plus sérieusement, pensez-vous que les metalleux soient plus ouverts d'esprit aujourd'hui, par rapport à l'époque où vous avez sorti le premier S.U.P, qui décontenança énormément de fans, certains quittant même le navire à ce moment-là ?
Fabrice : Non, je ne le pense pas, je pense que la musique est un peu plus accessible à tous, les fans de metal sont moins obtus, moins engagés également. Par contre, je suis très heureux que toi, Will, puisses aimer ce genre de titre. C'est un grand compliment, merci.
Ludovic : Il y avait, il y a et il y aura toujours des puristes, c'est comme ça. Le principal étant que tout le monde puisse s'exprimer artistiquement dans un respect mutuel.

Cette question est un peu la suite de la précédente... Mon sentiment est peut-être biaisé par rapport à mes propres goûts musicaux, mais j'ai l'impression que le projet S.U.P n'a pas toujours été bien compris par les fans. Quand vous aviez mis en route cette "vision" de votre musique, avec Anomaly, quel était votre but ? Vous vous sentiez trop à l'étroit dans le death metal ?
Fabrice : Je pense que tu as trouvé la bonne explication, c'est exactement ça, nous nous trouvions trop à l'étroit dans le death metal car nous aimons énormément d'autres choses. Le mélange nous plait beaucoup. Ca nous a permis de créer un style qui nous est propre. De ce fait, notre but a été atteint, avoir notre propre musique, développer notre propre personnalité, nous exprimer à travers la musique. C'est ça, notre but.
Ludovic : Compris ou incompris, cela nous est égal. Le principal est que nous puissions nous exprimer librement, ne pas se faire étouffer par les critiques ou les maisons de disques.

Je me trompe ou c'est le visage de Ludo qui a servi de base à la pochette ?
Fabrice : Tout à fait, il s'agit bien du visage de Ludo, nous avons trouvé que c'était une excellente idée d'avoir sa tête sur la pochette, comme sur celle d'Imago.
Ludovic : Au début de la création de la pochette de Matthieu Carton, c'était le visage d'un inconnu. Nous avons pensé, comme pour Imago, qu'il serait plus judicieux de mettre un membre du groupe à la place. À l'intérieur du livret, on retrouve tous les membres du groupe avec le même graphisme.
 
Votre pochette m'a questionné. Souvent, quand on fait une pochette dissymétrique, c'est pour opposer le bien et le mal. Là, on a un côté déjà très sombre à gauche avec le noir et un côté carrément "diabolique" à droite avec ce rouge et cette figure très agressive. Cela veut-il dire dans votre esprit qu'il n'y a pas de salut possible en ce bas monde pour les hommes ?
Fabrice : L'histoire est très sombre, il n'y a rien de bien chez cet homme dans l'histoire. Ce que l'on a voulu faire ressortir par cette pochette, c'est qu'il y a encore pire que le mal que l'on ressent. C'est le reflet de la douleur que l'on projette à la vue des autres. Les textes sont très jolis mais très durs. Ludo les a lus, relus et transposés. Il s'en est imprégné pour les exprimer, il a vécu les souffrances de cet homme. C'est aussi pour cela que c'est la tête de Ludo qui apparaît sur cette pochette. J'invite tout le monde à lire les textes. L'histoire a été écrite par Ludo mais les paroles ont été traduits par Siobhán McCarthy, qui s'occupe de ça pour nous depuis 1997. Et non, il n'y a pas de salut possible en ce bas monde, malheureusement.
Ludovic : L'illustration du dernier album est liée à l'histoire qu'il raconte.
 
Quand on voit que la majorité de la musique ou des vidéos s'écoute aujourd'hui sur des smartphones en mp3 ou mp4, on se demande parfois pourquoi on doit continuer à se faire chier à aller en studio, non ? Comment avez-vous bossé le son cette fois-ci (excellent au passage) ?
Fabrice : Nous avons tout fait chez nous, dans notre salle de répétition et l'album a été mixé et masterisé par Grégoire Saint-Maxin (Loudblast, Black Bomb A, Gojira...). Il a fait un formidable travail. Il a compris notre univers, et l'a retranscrit comme on le voulait. Donc, pour nous, plus de studio, pas besoin d'aller s'enfermer dans un endroit qui ne nous correspond finalement pas. Comme dirait Ludo, quand la musique est bonne, il n'y a rien à ajouter. Il faut tout de même sortir des disques, c'est ce qui va nous rester à la fin.
Ludovic : De toutes façons, les labels ne financent plus les groupes pour les enregistrements depuis longtemps. Depuis l'album Angelus, nous payons tout de notre poche. Autant dire que si tu paies ton propre pressage et avec un bon réseau sur le Net, un groupe peut gagner jusqu'à dix fois plus, soit cinq euros par album au lieu de cinquante centimes, pour pouvoir financer ses prochaines productions. Mais il n'est pas question d'argent ici, nous faisons cela par pure passion.
 
Le groupe existe depuis des lustres, et vous avez su garder la même équipe (j'y inclue Fréd qui est là depuis plus de 20 ans, et aussi les potes Arno et Dom')... Quels rapports entretenez-vous aujourd'hui, comment bossez-vous ensemble ? Et penses-tu que c'est cette unité qui fait que vous êtes toujours actifs aujourd'hui ?
Fabrice : Oui, Fred est parmi nous depuis plus de 20 ans, Arno, Dom, Eric Depierre, Gre, Jean-Loup, Deul depuis quelques temps. Malheureusement, on ne se croise plus beaucoup, chacun étant beaucoup pris par ses activités respectives. Nous ne faisons plus beaucoup de concerts. C'étaient des moments où l'on se retrouvait le plus souvent. Nous sommes principalement à quatre désormais.

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Avec tout le respect que j'ai pour eux, car ils font un travail remarquable, on ne peut pas dire qu'Overpowered Records soit un gros label. On s'étonne donc qu'un groupe comme S.U.P ne sorte pas son disque sur un label un peu plus réputé. Peux-tu nous expliquer ce choix ?
Fabrice : Nous sommes très contents d'Overpowered Records. Il n'y pas beaucoup de labels qui nous auraient permis de nous exprimer exactement comme nous le voulons. A part Holy Records dans les débuts, je n'en vois pas d'autres. L'avantage de ce choix, c'est que nos albums nous appartiennent totalement. C'est le but ultime, nous avons et gardons les droits de notre musique grâce à ce label. Et ça c'est plus fort que tout. C'est dur de devoir accoucher d'un enfant et de te dire que ce n'est plus le tien. Et bien là, ce n'est pas le cas. Ensuite, on a un album en digipack, un vinyle, une tournée, une bonne promo. Que demander de plus ? Pour nous, c'est parfait. On sait que l'on ne deviendra jamais des stars.
Ludovic : C'est quoi un label réputé ? Un label qui va choisir une pochette d'album à ta place ? Non merci. Un groupe se doit de garder sa propre identité visuelle et artistique. Si nous avions décidé d'enregistrer dans un garage avec deux micros et sur la pochette, de mettre un oiseau en train de chier sur un squelette en moto, eh bien tant mieux ! Cela aurait été notre volonté.
 
Alors, vous allez partir en tournée, ce qui n'était pas arrivé depuis un moment. Mais franchement, avec tout le respect qu'on doit à Gorod et Psykup, voir S.U.P écrit en petit tout en bas de l'affiche de la tournée, ça a fait tiquer pas mal de gens, car nombreux sont ceux qui pensent que vous méritiez un meilleur traitement voire plus de respect concernant cette tournée, au regard de votre ancienneté et du côté culte du projet... Qu'en penses-tu ?
Fabrice : C'est sympa de ta part de dire ça Will, mais ce sont des groupes qui bénéficient d'une grande notoriété. Nous ne faisons pas beaucoup parler de nous, les gens oublient. Ce n'est pas l'ancienneté qui fait un groupe, ni sa réputation, ce sont les chiffres qui parlent le plus malheureusement. Donc, non, nous sommes très contents de partager l'affiche avec ces groupes. Je suis certain que ça sera très cool. Nous sommes ravis de repartir sur les routes. Il n'y a pas vraiment de tête d'affiche, chaque groupe aura le même temps pour s'exprimer, l'ordre de passage est accessoire. Ca ne changera pas la qualité du concert.
Ludovic : Ouais, c'est un détail pour moi.

Il y a quelques perles déjà appelées à être des incontournables sur cet album, je pense notamment à "Cathedra" ou encore "The Chasm And Chronograph", avec des ambiances et des refrains soignés. Vont-ils être joués sur cette tournée ?
Fabrice : Nous avons établi une setlist inédite spéciale "fans". Nous allons jouer trois morceaux du nouvel album et oui, ces morceaux feront partie de cette liste.
Ludovic : Avec peut-être une reprise en fin de set.

Les gars, cette interview touche à sa fin... Dernière question, qu'attendez-vous de la sortie de cet album ? Un dernier mot pour les lecteurs de Metallian et Noiseweb ?
Fabrice : Nous attendons de bons retours de nos fans. J'espère qu'ils apprécieront notre travail. S.U.P reste notre vie, nous ne pouvons nous en passer. J'espère sincèrement que ce nouvel album vous plaira. Un grand merci, Will ! Nous avons hâte de te recroiser, tu fais partie de ces personnes qui ont beaucoup compté pour nous. Tu étais toujours présent lorsque l'on avait besoin de toi.
Ludovic : Merci Will ! À bientôt et plein de bonnes pour toi et tes proches ! Aux lecteurs de Metallian et Noiseweb, merci pour votre soutien et rendez-vous sur la route. \m/


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